Perpet. pour Blaise-Hyacinthe et Diendéré dans le procès Sankara : C’est par où la réconciliation ?

Perpet. pour Blaise-Hyacinthe et Diendéré dans le procès Sankara : C’est par où la réconciliation ?

Disons-le tout net, personne ne s’attendait à ce que le réquisitoire du procureur militaire s’alourdisse de façon barométrique avec le verdict des juges, dans ce procès hors norme qu’a été celui de l’assassinat de Thomas Sankara et ses 12 compagnons.

De 30 ans pour Blaise Compaoré jugé in absentia et 30 ans pour Hyacinthe Kafando jugé par contumace aussi et 20 ans pour Diendéré, le Tribunal militaire a eu la main lourde en prononçant la perpétuité pour Blaise, en exil à Abidjan, Diendéré qui purge déjà une peine de 20 ans dans l’affaire du putsch manqué du 16 septembre 2015 et Hyacinthe lui aussi en cavale.

Deux leçons se dégagent après que le Tribunal militaire a vidé son délibéré :

1) C’est un verdict terrible mais historique qui consacre encore une fois de plus l’indépendance de la justice burkinabè. Jamais en Afrique pour peu qu’on puisse citer un exemple, une telle indépendance est rarissime pour ne pas être mentionnée, qui plus est dans un Etat d’exception. Oui, c’est sous une Transition que le dossier Sankara a été dépoussiéré, exhumé, et connut un coup d’accélérateur en 2015. Ironie de l’Histoire, c’est sous une autre Transition que le procès a connu son épilogue, en attendant peut-être un appel des condamnés. Stricto sensus, le droit a été dit, car si l’on revisite les 6 mois d’audience de la Salle des Banquets de Ouaga 2000, les accusés, les 12 présents dans le box ont bénéficié d’un procès équitable, et même que leurs conseils à un certain moment ont mis à rude épreuve ceux des parents des victimes.

Mais voilà comme le professait Cicéron Summum jus Summum injuria, «la plus grande justice est la plus grande injustice». Les avocats de Blaise, au premier chef duquel, Me Pierre Olivier Sur n’ont jamais cessé de dénoncer une justice burkinabè aux ordres, vermoulue, et ont trouvé inutile et risqué que l’illustre client, ne s’aventure à se présenter devant cette juridiction d’exception.

2) La deuxième leçon de ce verdict est qu’on a désormais les 2 maillons du puzzle du triptyque vérité et justice, il reste le 3e chainon manquant : la réconciliation, du moins le format de ce ciment du vivre-ensemble qu’on veut concocter pour les Burkinabè.

En effet, une loi d’amnistie serait déjà dans les tuyaux, et l’Assemblée législative de Transition (ALT), qui vient de s’installer serait déjà en pré-alerte pour cette tâche. Seulement, une Loi amnistiante effacerait tout, et du coup, les familles des victimes se sentiraient «trahies» même s’il y a eu indemnisations et compensations.

Il reste la voie de la grâce présidentielle qui absout, sans effacer. Mais le lieutenant-colonel Damiba serait-il prêt à user de cette prérogative discrétionnaire ? Blaise, Diendéré, Hyacinthe et Cie sont-ils prêts à l’accepter. A écouter en tout cas Me Pierre Olivier Sur, son célèbre client n’est pas prêt à ça même si l’ancien bâtonnier est un partisan de cette réconciliation. Que dire de ce verdict du procès Thomas Sankara ?

Les juges sont allés au maximum du droit pénal burkinabè qui a supprimé la peine de mort. Ils sont allés plus loin que les réquisitions du procureur militaire et de Mariam Sankara, la veuve, laquelle avait trouvé ces réquisitions clémentes. Le triptyque vérité-justice et réconciliation se précise, reste à esquisser les contours de cette dernière, qui cimentera la cohésion sociale. La justice a fait sa part de boulot, reste aux politiques de trouver le 3e maillon, le bon. Il y a lieu de saluer la persévérance du comité Sankara (avec la procession hier au Mémorial jusqu’à l’ex-pavillon Haute-Volta où Sankara a été abattu), saluer aussi tous les avocats.

Par ce procès et ce verdict, le Burkina Faso a prouvé que le crime politique paie de moins en moins en Afrique. Il faut jouer la transparence avec le peuple. Tous les dirigeants devraient vider leurs contentieux avant de partir, sinon gare au retour du bâton.

Enfin, si l’on dit que lors du procès, la responsabilité de la Côte d’Ivoire en tant qu’Etat est engagée dans ce crime selon Me Guy Hervé Kam  qui cite des documents, pour la France, malgré les 2 drafts déclassifiés par Macron, il n’y a pas une once de preuve qui éclabousse l’Etat français. Que des missi dominici aient agi dans l’ombre, c’est possible, pas l’Etat français officiel.

Vérité et justice, peu ou prou, on l’a mais comment trouver la vraie catharsis, celle des cœurs, la véritable réconciliation c’est par où ?

La REDACTION

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