Premières élections post-Mugabe : Le «Crocodile» ou le chaos ?

Premières élections post-Mugabe : Le «Crocodile» ou le chaos ?

C’est inédit et inimaginable, il y a seulement un an : un scrutin sans la photo du «camarade Bob» sur les bulletins de vote ! Et aussi une présidentielle, des législatives et des municipales aussi ouvertes ? Et pourtant, hier 30 juillet, les Zimbabwéens ont pris le chemin des urnes, une première depuis 1980, pour accomplir leur acte citoyen, sans Robert Mugabe parmi les compétiteurs. Déposé le 21 novembre 2017, par une coalition politico-militaire, celle de son propre parti, la ZANU/PF et des vétérans de la guerre de libération, après un interminable règne de 37 ans, le vieil héros mué en dictateur, avait semblé ne pas en vouloir à son tombeur, son ex-chef des securocrates Emmerson Mnangagwa. En effet, lors d’une précédente sortie le 18 mars, il avait laissé entendre qu’il n’avait pas de haine pour Emmerson, même, s’il disait que ce dernier était illégal.

Mais c’était sans connaître, le vieux combattant, qui apparemment marinait dans une rancœur tenace, qu’il a laissé éclater, ce 29 juillet 2018, veille de ces élections censées marquer l’avènement d’un soleil nouveau sur l’ex-Rhodésie. Mugabe a non seulement signifié qu’il ne donnera pas sa voix à Mnangagwa mais appelle même à voter pour son principal adversaire du MDC, Nelson Chamisa. Une vengeance, du reclus de High field, six mois après sa défénestration ? Sans doute. Reste à savoir, si les militants de la ZANU/PF dont nombreux souhaitent le changement, entendront la voix de celui qui est le concentré de tout ce que l’Afrique a de laideur en politique. Vote pour le changement donc ! Mais quel changement ? Avec Emmerson Mnangagwa 75 ans dont plus d’une trentaine de compagnonnage avec Mugabe, même si ce dernier avance avoir mis une croix sur son passé ? Mais il y a des passés qui ne passent pas, surtout lorsqu’il y a des fantômes non exorcisées, comme ceux du Matabeland ou de 2008 après les élections.  Sous réserve d’inventaire, celui qui fut le Bad Cop de Mugabe, donc le patron de tout l’appareil répressif et dont le fantôme hante toujours les plaines et collines du Matabeland, notamment chez l’ethnie Ndele, un tel personnage peut-il changer ce Zimbabwe qu’il a contribué à formater ? Seuls les imbéciles ne changent pas nous dit l’adage populaire. Et tirant peut-être leçons des errements de son  ex-patron et camarade de lutte, et touché aussi par la grâce, Emmerson peut émerveiller en faisant lever une aube nouvelle sur le Zimbabwe s’il est élu, parmi les 23 postulants.

Son élection ! Voici justement la hantise de bon nombre de ses compatriotes qui tablent sur un second tour. car le 20 juillet dernier, un sondage, donnait la victoire à la ZANU/PF donc à Emmerson, dans un petit mouchoir de poche (trois points d’avance) dans les intentions de vote. En dix jours, ce sondage a sans doute évolué, mais dans quel sens ? Et si par extraordinaire, le jeune Nelson Chamisa du MDC battait Emmerson ? C’aurait été le défunt, Morgan Tsvangirai, que ce scénario aurait été presque plausible. Mais, qui sait si le peuple zimbabwéen voulait essayer le programme du MDC ? C’est à cette perspective qu’on comprend la peur de plusieurs Zimbabwéens qui se sont apprêter à quitter le pays, dès lors même qu’un second tour est annoncé. car après avoir été à la baguette pour chasser Mugabe, après avoir revêtu les oripeaux de Brutus, on voit mal comment, Emmerson, accepterait de se faire battre et partir allègrement.

On ne goûte pas au précieux nectar et s’en aller facilement en Afrique. C’est pourquoi, il faut craindre que si ballotage et même victoire, il devait y avoir de Chamisa, il faut craindre, un remake des violences de 2008, sinon pire, car, pour ce coup-ci Emmerson défend un pouvoir, le sien personnel, pas celui de Papy Bob. Les Zimbabwéens même s’ils parlent de changement n’ont pas tellement le choix, car, ce sera le «crocodile» ou le chaos. Le moindre mal est évident.

La Rédaction

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