Le climat politique s’est considérablement dégradé au lendemain de la proclamation par la Commission électorale indépendante (CEI) des résultats de la présidentielle du 31 octobre. Alors que plusieurs partisans du chef de l’Etat sortant jubilaient dans la rue d’Abidjan pour célébrer la victoire de leur champion Alassane Ouattara, plusieurs leaders de l’opposition ont vu leurs résidences encerclées par la police. Depuis la soirée du mardi 3 octobre, Henri Konan Bédié, Pascal Affi N’Guessan, Maurice Kacou Guikahué, ne sont plus libres de leurs mouvements. En effet, ils sont désormais placés sous surveillance policière avec une sorte de blocus imposé dans leur domicile respectif.
L’intervention la plus emblématique fut celle qui a visé le domicile de l’ex-président Henri Konan Bédié, patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire/rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA). Aux environs de 14 heures, alors que le tout nouveau président du Conseil National de la Transition s’apprêtait à dévoiler la composition de cet organe créé la veille, et qu’une meute de journalistes attendaient le début du point de presse, plusieurs cargos de CRS et du Groupement mobile d’intervention (GMI) ont effectué une descente et dispersé les partisans de l’ex-parti majoritaire à coups de gaz lacrymogènes avant d’y établir un siège. Depuis, une sorte de blocus est imposé à tous ceux qui ont eu la malchance de se retrouver à l’intérieur de la résidence du président Bédié. La veille, le ministre de la Justice avait à demi-mot, lancé des menaces contre la coalition de l’opposition, qui avait remis en cause la réélection du président sortant Alassane Ouattara et annoncer la mise d’une transition civile. Cette prise de position avait été qualifiée de «Complot contre l’autorité de l’Etat et l’intégrité du territoire national» par le ministre de la Justice, Sansan Kambile. «Le gouvernement a saisi le procureur de la République d’Abidjan afin que soient traduits devant les tribunaux les auteurs et les complices de ces infractions», a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse.
Cette nouvelle montée d’adrénaline, est la preuve que la Côte d’Ivoire glisse dangereusement vers une zone de turbulence dont on ignore l’étendue. Après une campagne électorale caractérisée par des scènes de violences et des affrontements meurtriers, un scrutin marqué par de violences éparses, le pays de Félix Houphouët Boigny semble avoir pris rendez-vous avec les démons de la crise postélectorale dont les stigmates restent vivaces dans les esprits des Ivoiriens et visibles dans certaines zones du pays.
Face à l’incertitude, plusieurs réactions ont été enregistrées. De la délégation de l’Union Européenne, à la France en passant par les Etats-Unis, les grandes chancelleries ont tous appelé à l’instauration d’un dialogue franc et inclusif pour sauver les meubles. Ces appels qui n’ont pour l’heure reçu un écho favorable de la part des protagonistes restent tout de même la meilleure option pour ramener la sérénité et la confiance entre ces frères ennemis qui de par leur égo surdimensionné, auront brillé par leur incapacité à faire bon usage de l’héritage du père de la nation Houphouët Boigny, qu’est la paix. Cette richesse dont il s’était fait l’ardent défenseur constamment galvaudée par les uns et autres depuis 1996, est un passe de devenir un vague souvenir dans la mémoire collective des populations ivoiriennes, nostalgiques de l’ère Houphouët.
La rédaction
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