Prestation de serment d’IBK : Sur fond de crise postélectorale et vieux défis à relever

Prestation de serment d’IBK : Sur fond de crise postélectorale et vieux défis à relever

Un peu plus de trois semaines après le deuxième tour qui a sacré le second mandat présidentiel d’Ibrahim Boubacar Keïta, c’est le Palais de la culture de Bamako qui a abrité, hier mardi 4 septembre, la cérémonie d’investiture. Tout de blanc vêtu, comme pour symboliser sa quête de paix, IBK a prêté serment devant la Cour suprême du pays, selon la formule consacrée.

«Je jure devant Dieu et le peuple malien, de préserver en toute fidélité le régime républicain, de respecter et de faire respecter la Constitution et la loi». D’une formule consacrée à une autre, le chef de l’Etat malien, réélu pour un deuxième quinquennat à la tête du Mali, dira dans son discours d’investiture : «Je serai le président de tous les Maliens, je suis le président de tous les Maliens, de toutes les Maliennes et de tous les Maliens de toutes les régions et de la diaspora». En d’autres temps, on aura applaudi à tout rompre. Malheureusement, le pays de Soundiata Keïta, cité en exemple dans l’histoire des démocraties africaines, connaît une situation postélectorale qui laisse la porte ouverte à diverses formes de dérives.

Comme si finalement, la légitimité se forgeait dans la rue, les partisans du président élu Ibrahim Boubacar Keïta y ont rejoint «Soumi champion» et les siens, le dimanche 2 septembre dernier, déterminés à exiger le «respect de la légalité». Le camp du candidat malheureux lui,  a battu le pavé hier après-midi pour la 4e fois. Soutenu par une coalition de partis et d’associations de la société civile, Soumaïla Cissé conteste plus que jamais, les résultats du «hold up électoral» réussi par son éternel adversaire, avec la complicité complaisante et coupable de la Cour constitutionnelle.

Si la cérémonie d’investiture d’hier mardi donne plein mandat à IBK pour conduire la destinée des Maliens ces 5 prochaines années, elle ne confère aucune sérénité aux Maliens qui s’interrogent sur l’aboutissement du bras de fer qui a trouvé son terrain de prédilection dans les rues. A défaut d’avoir pu mobiliser l’électorat pour un meilleur taux de participation, l’Opposition, motivée par l’ampleur de la clameur des rues, aussi bien à Bamako qu’à l’intérieur du pays et dans certaines capitales africaines, entend poursuivre sur cette lancée.

Arrivé au pouvoir en 2013, dans un contexte de guerre contre les islamistes armés, Ibrahim Boubacar Keïta martèlera dans son discours, avoir «choisi de placer le rétablissement de la paix et de la sécurité au niveau de priorité absolue». On ne peut s’empêcher de penser à la nécessité absolue d’appliquer l’accord de paix de 2015 resté lettre morte. Pour y parvenir, il aura sans doute besoin du soutien du peuple malien d’où, tout en rejetant les accusations de fraudes électorales formulées par son adversaire du second tour, son appel à «l’opposition à faire bloc, avec lui, face aux risques qui pèsent sur la sécurité au Mali». Le mot est lâché, «insécurité», ce danger permanent sur la tête des Maliens tel l’épée de Damoclès, l’enfant de Sébénikoro a vu son capital s’éroder dangereusement auprès des Maliens, au fil de son mandat précédent. Même si des efforts n’ont pas manqué, le chapitre sécuritaire est perçu, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur, comme un échec cuisant, du fait de la perte totale dans certaines zones du pays, de l’autorité de l’Etat. D’ailleurs, le président de la Cour suprême, Nounhoum Tapily, ne s’est pas dérobé lors de la cérémonie : «Un des soucis majeurs demeure : la restauration de l’autorité de l’Etat à travers la présence effective des pouvoirs publics et des services sociaux de base, sur toute l’étendue du territoire national», lancera-t-il au président réélu.

Finalement, même si physiquement et financièrement, IBK se serait considérablement délesté, la grimpée de la colline de Koulouba semble de loin, moins harassante que le poids de la destinée que le peuple malien vient de porter sur les épaules de ce septuagénaire. Outre la dégradation des conditions de sécurité due aux insurgés islamistes et aux diverses tensions ethniques, celui qui entame depuis hier son dernier baroud d’honneur à la tête du Mali va devoir œuvrer à redonner espoir aux Maliens, en leur fournissant du travail, en luttant contre la corruption et surtout en gérant et répartissant au mieux la richesse du pays.

Cependant, on ne construit que sur du solide. Et IBK doit s’empressé de redonner une stabilité fiable à ce socle, sérieusement lézardé par son adversaire du second tour qui, quoi qu’on dise, est en train de rallier à sa cause, non pas forcément ses partisans, mais immanquablement tous ces hommes et femmes, que la gestion parfois calamiteuse de son premier quinquennat à laisser en rade. Cette rançon de la mal-gouvernance et des promesses non- tenues, IBK doit forcément la solder d’une façon ou d’une autre, pour espérer réunir toutes les forces maliennes contre le mal djihadiste.

Hamed JUNIOR, envoyé spécial à Bamako

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