Placées sur le thème : «La dermatologie au Burkina Faso : Etat des lieux, opportunités et perspectives à l’ère du numérique», les 6e journées de dermatologie de Ouagadougou se tiendront les 4 et 5 octobre 2019. C’est dans cette optique que nous avons rencontré deux personnalités influentes du milieu. Il s’agit des Professeurs Adama Traoré, l’un des premiers dermatologues du pays et chef du service de dermatologie- vénérologie du CHU-YO, qui nous a entretenu sur l’histoire de cette spécialité. Et Pascal Niamba, président de la Société burkinabè de dermatologie et d’esthétique et de cosmétologie (SOBUDEC) pour faire le point des enjeux du congrès.
La dermatologie est une spécialité de médecine qui s’occupe de la peau, des muqueuses et des phanères (ongles, cheveux, poils). Elle est associée à la vénérologie, c’est-à-dire l’étude des maladies vénériennes ou Infections sexuellement transmissibles (IST). «Les dermatologues sont aussi des vénérologues. C’est -à- dire qu’ils s’occupent de la beauté des soins, traitent les maladies de la peau, des muqueuses (entrées de tous les orifices), des cheveux, des ongles… Quant à la vénérologie, elle concerne toutes les infections sexuellement transmissibles, affections dont les dermatologues s’en occupent», déclare pour sa part Pr Adama Traoré, chef du service de dermatologie-vénérologie au Centre hospitalier universitaire Yalgado Ouédraogo (CHU-YO).
Selon ce dernier, il y a une demande de plus en plus forte de dermatologues au pays des hommes intègres, qui dépasse largement l’offre. Arrivé à Yalgado en 1991 et 2e dermatologue du Burkina, Pr Traoré se rappelle qu’à l’époque, l’on ne disposait de dermatologues que dans la seule capitale. A l’heure actuelle, même couvrant quelques régions, il y a une disparité et la demande reste toujours forte. «L’idéal serait qu’on puisse avoir un spécialiste pour 20 000 à 50 000 habitants». Cependant, en faisant le ratio, chacun a en charge plus d’un million de Burkinabè.
Tout en reconnaissant que l’Etat fait des efforts, «il a pu mettre en place un programme de formation des spécialistes, qui donne des bourses aux étudiants pour se former et devenir des spécialistes dans les différents domaines de la médecine dont la dermatologie, programme qui a vraiment boosté le nombre de dermatologue», en tant que responsable de l’enseignement dans ce domaine, il indique que l’effort doit être poursuivi afin d’avoir le ratio mentionné plus haut.
Premier président de la SOBUDEC, Pr Adama Traoré a passé la main en 2017 au Pr Pascal Niamba. Plusieurs actions en faveur de la dermatologie sont à mettre à son actif, qui note d’ailleurs, qu’il faisait de son mieux pour non seulement dispenser des soins, notamment les infections cutanées, l’acné, les allergies… mais aussi réfléchir à la perspective de la dermatologie dans notre pays.
Quid des missions de la SOBUDEC ?
A cette interrogation, Pr Pascal Niamba, président de la Société burkinabè de dermatologie, d’esthétique et de cosmétologie (SOBUDEC) fait savoir qu’elle est une société savante comme les autres sociétés savantes, qui a pour rôle d’entretenir sur le plan de la recherche, de la formation et de l’information sur tout ce qui touche à la dermatologie. C’est dans ce sens que les dermatologues, cosmétologues, esthéticiens sympathisants se sont dits qu’il fallait mettre en place cette structure pour pouvoir répondre à toutes les questions liées aux maladies de la peau. Ainsi donc, créée en septembre 2004, la SOBUDEC a pour principales missions de: promouvoir la dermatologie, la cosmétologie et l’esthétique au Burkina, favoriser les contacts et échanges entre les membres, promouvoir le développement de la pratique de l’enseignement, de la recherche en dermatologie et cosmétologie, contribuer à la formation continue des différents membres. Dans ce sens, annuellement, «nous organisons des congrès aux niveaux national et sous-régional», laisse entendre Pr Niamba, qui fait allusion au congrès national de cette année. Hormis les congrès, on peut ajouter les interventions en faveur d’un certain nombre de populations. Exemple, dans les lieux de détention, où ils ont contribué à la prise en charge des malades. «Nous sommes aussi intervenus auprès des personnes vivant avec l’albinisme pour contribuer à leur soin», a-t- il poursuivi. Il n’a pas omis de souligner aussi l’organisation de consultations foraines (journées portes- ouvertes) où ils prennent en charge tous ceux qui viennent avec des maladies de la peau.
Vers l’expérimentation de la télé dermatologie
La dermatologie n’est toujours pas bien connue dans notre milieu, quand bien même les besoins de prise en charge des maladies de peau sont d’actualité, en témoigne le rang qu’elles occupent (quatrième) de tous les motifs de consultations médicales. En plus, le nombre de spécialiste est insuffisant : 29 dermatologues pour une population d’environ 20 millions. C’est pourquoi, «notre spécialité se prête déjà à l’opportunité de faire de la télé dermatologie ou télé expertise», confie le président de la SOBUDEC. Pouvoir utiliser l’image étant à distance et donner des informations qui aboutiront à un diagnostic, s’imposait donc aux dermatologues, qui estiment que c’est une opportunité d’augmenter l’offre de soins pour les populations qui ne disposaient pas de dermatologue dans leur localité. Toutefois, à l’en croire, cette innovation n’empêchera pas qu’il y ait les différentes étapes participant à l’aboutissement d’un diagnostic, notamment les renseignements autour de ces lésions fournis par les médecins généralistes et paramédicaux, qui devront à l’aide des photos et renseignements, situer sur les cas et demander un expertise qui se fera selon un canevas.
«Ce n’est pas certainement une solution qui pourra régler tous les problèmes de la peau mais nous pensons qu’elle nous évitera d’évoluer vers des problématiques liés au cancer ainsi que d’autres maladies», soutient Pr Niamba. Concernant ces 6es Journées de dermatologie de Ouagadougou, plusieurs activités sont au programme parmi lesquelles, une conférence, des communications, un atelier, une Assemblée générale (AG) de la SOBUDEC.
Boureima SAWADOGO
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