Procès Dabo Boukary : Les accusés Diendéré et Bamba présents, Yougbaré en «fuite»

Procès Dabo Boukary : Les accusés Diendéré et Bamba présents, Yougbaré en «fuite»

32 ans après, le dossier Dabo Boukary s’est enfin ouvert hier lundi 19 septembre 2022 au Tribunal de grande instance (TGI) Ouaga II. Le général Gilbert Diendéré, (capitaine au moment des faits), le lieutenant-colonel Mamadou Bamba (étudiant au moment des faits) et Victor Magloire Yougbaré (sergent au moment des faits), sont poursuivis pour complicité d’arrestation illégale et séquestration aggravée, complicité de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner, et recel de cadavre. Parmi les trois accusés, un manquait à l’appel. Il s’agit de Victor Magloire Yougbaré. Il a donc été considéré comme un fugitif et le tribunal a décidé de le «juger par défaut» même si son avocat soutient que son client est malade depuis un moment. Donné d’abord pour fugitif en cavale dans les années 90, lors de son arrestation, puis après donné pour mort après tortures (il aurait succombé suite aux sévices), l’étudiant en 7e année de médecine, Dabo Boukary est un des innombrables fantômes qui hantent le Burkina depuis plus de 3 décennies. De nombreux étudiants des années 90, se souviennent des luttes menées à l’époque pour savoir ce qu’il est advenu de lui (une place Dabo Boukary existe à l’Université Joseph Ki-Zerbo) mais en ces années-là, ce n’était pas évident. Qui a ordonné l’arrestation et la torture de Dabo Boukary ? C’est ce que tentera d’élucider le tribunal siégeant à Karpaala.

 

Le médecin lieutenant-colonel Mamadou Bamba a été le premier à faire sa déposition à la barre. Etudiant en médecine au moment des faits, il est accusé d’avoir servi de guide et d’informateur aux militaires de l’ex-Régiment de la sécurité présidentielle (RSP) pour les interpellations des étudiants. Devant les juges, il a plaidé non coupable. «J’ai été meurtri dans mon âme, dans mon esprit et dans ma chair par les faits dont on m’accuse. C’est avec soulagement que je viens à ce procès parce que ça va me permettre de me décharger de ce fardeau que je porte sur le cœur depuis des années maintenant», a déclaré l’accusé. Il explique qu’au moment des faits, il était le délégué du comité révolutionnaire de l’Université de Ouagadougou, comité qui répondait de l’Union nationale des jeunes du Burkina (UNJB) et dont la mission consistait, à en croire les dires du prévenu, à faire adhérer le maximum d’étudiants au régime révolutionnaire. Ce dernier affirme qu’il était peu favorable aux manifestations de l’ANEB à cette époque. «Moi je leur disais tout le temps que s’ils veulent aller en grève, qu’ils le fassent mais qu’ils laissent ceux qui veulent faire les cours venir à l’école. Mais quand tu es un délégué du comité, c’est comme si on avait fait une croix rouge sur toi. Ils ont fait croire aux étudiants que c’est le délégué de comité qui est à l’origine de tous leurs malheurs», confie-t-il. Alors, l’accusé tout remonté met au défi quiconque de pouvoir confirmer que c’est lui qui a donné l’ordre d’arrêter les étudiants. Alors qu’il était étudiant en médecine, Mamadou Bamba a intégré les Forces armées nationales en novembre 1990. Mais, cette intégration ne s’est pas faite de façon ordinaire. L’accusé l’a confirmé lors de son audition. «C’est Roch Marc Christian Kaboré qui m’a aidé en me recommandant au Président Blaise Compaoré», dit-il. L’accusé va plus loin en disant que «pendant que ceux qui avaient passé le test n’avaient pas encore leurs résultats, lui était déjà admis».

Me Farama ne veut pas

du folklore

Il faut noter que 19 dossiers sont inscrits au rôle de la chambre criminelle de la Cour d’appel de Ouagadougou dans sa 3e session, pour le compte de l’année judiciaire 2021-2022, du 19 au 30 septembre 2022 dont les affaires Dabo Boukary et Guiro Ousmane. Pour cette session, il y a 42 accusés, 44 parties civiles, 107 témoins et une trentaine de chefs d’accusation, a indiqué le procureur général, Jean Jacques Ouédraogo. «Nous avons une large palette d’infractions au-delà des dossiers emblématiques qui permettent d’évacuer les dossiers qui étaient-là depuis un bout de temps et qui menaçaient peut-être même de prescription pour certains», a expliqué le procureur général. Me Prosper Farama, avocat des parties civiles a également souhaité que le procès respecte les règles de droit de toutes les parties. «Ce procès ne doit pas être du folklore», a précisé Me Farama. La défense quant à elle, estime que tous les éléments ne sont pas réunis pour le bon déroulement du procès. «Si vous remarquez, il n’y a que des présumés complices qui sont-là. Quand on parle de complicité, les auteurs, où sont-ils ?», s’interroge Me Mathieu Somé, avocat de Gilbert Diendéré.

Omar SALIA

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