Procès du putsch manqué acte II  : Une justice africaine à l’épreuve du terrain

Procès du putsch manqué acte II : Une justice africaine à l’épreuve du terrain

Procès sous haute surveillance. Dès l’Hôtel Laïco sur l’Avenue Pascal Zagré située à 500 m des lieux, un barrage avec des gendarmes qui veillent, de l’autre côté au niveau de la direction de la douane, même mesure sécuritaire. Pour y entrer, il faut montrer patte blanche. Une foultitude de vices de forme, soulevés dans la salle:

Notamment un président de tribunal qui ne l’est pas de jure car le décret le nommant n’était pas en vigueur et de facto les assesseurs qu’il ne saurait nommer, lui-même étant illégal. Une chambre de jugement biffée par un décret de juillet 2017 qui n’est donc pas habilitée à juger, le garde des sceaux, partie civile qui nomme des juges… Après une bataille procédurale et des irrégularités brandies  par les avocats de la défense qui ont mis un arrêt au début du méga procès le 27 février dernier, les choses semblent bel et bien avoir démarré hier 21 mars du côté de la salle des Banquets de Ouaga 2000.

Du moins excepté le fait que la défense récuse toujours le patron du tribunal, la locomotive de ce jugement ‘’balaise’’ s’est ébranlée et sauf autre couac, ce matin 22 mars, on ne sera plus en surface après les mises en bouche épicées des vices formels, les juges iront chercher la vérité sur ce second putsch le plus bête de la sous-région après celui du Malien Haya Amadou Sanogo. Du reste, la suspicion sur la partialité du tribunal a été un peu gommée avec l’arrêt du Conseil constitutionnel, qui souligne que le tribunal militaire est une juridiction d’exception. De ce fait, il faudra donc aller en profondeur et trouver des réponses à certaines questions qui taraudent les juges et les Burkinabè. Pourquoi ce 16 septembre 2015, le RSP s’est piqué d’interrompre une transition que les Burkinabè ont ahané à mettre sur pied et ce, à quelques encablures d’une élection qui devait signer le retour du Burkina dans le juron de l’Etat de droit ?

Le général Diendéré a-t-il ourdi ce putsch ou est-ce les capitaines Abdoulaye Dao et autres commandants Aziz Korogo qui l’ont exécuté avant de le mettre devant le fait accompli ?

Quel a été le rôle du général Djibrill Bassolé ? Est-ce seulement ses coups de fil avec l’occupant du perchoir ivoirien qui constitue la base de sa supposée implication ?

Que sait-on des implications ivoiriennes dans ce coup de canif contre la transition ?

Un pronunciamiento manqué étant toujours un acte hautement politique, le procès de ces acteurs l’est, et si la justice est indépendante, le jugement qui se déroule dans la salle des banquets de Ouaga 2000 traîne une exhalaison politique, à commencer d’ailleurs par la nature du tribunal militaire. La perception de l’opinion est qu’il y a comme quelque part certains qui n’ont pas intérêt à ce que ce procès se tienne. Pourquoi ? Et pourtant il le faut parce que 15 personnes sont mortes, 250 blessés, les fondements d’un pays ont été ébranlés et ça fait un mauvais exemple le retour du pouvoir kaki. Que dire donc de ce gigantesque procès au Burkina ? C’est là encore une justice africaine à l’épreuve du terrain.

Depuis des lustres, la CPI subie procès sur procès en partialité, en tribunal pour peau à taux de mélanine élevée, et s’il est vrai que les chefs d’Etat qui prononcent ces réquisitoires, (N’Kurunziza, Zuma à l’époque…), ne sont pas des exemples, l’Afrique se doit de prouver qu’elle peut bien juger ses princes déchus ou ses fils qui prennent des libertés avec les droits de l’homme ou commettent des crimes contre l’humanité.

A l’instar donc des Chambres africaines extraordinaires (CAE) juridictions d’exception créées en vertu d’un accord entre l’Union africaine et le Sénégal et qui avaient condamné le Pol Pot tchadien Hissene Habré, et qui a montré que l’Afrique peut juger les Africains, le tribunal militaire de Ouaga devra lui aussi en tant que juridiction du même genre, s’affranchir des desiderata environnants et juger en toute impartialité les 86 personnes qui sont dans le box des accusés. Une justice qu’elle soit de droit commun, exceptionnelle ou transitionnelle se doit d’être exemplaire. C’est sous réserve des minutes du procès et du verdict que ce tribunal militaire administrera la preuve que désormais plus besoin d’aller ailleurs pour juger les puissants d’hier. Le monde entier regarde Seydou Ouédraogo et ses juges .

Sam Chris

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