Procès putsch manqué : « La 108.0 émettait dans l’illégalité », sergent Pagbelem

Procès putsch manqué : « La 108.0 émettait dans l’illégalité », sergent Pagbelem

Débuté le mardi dernier, l’interrogatoire du sergent Hamidou Pagbelem s’est poursuivi hier mercredi 29 août 2018, à la salle des banquets, tenant lieu de tribunal militaire. Ainsi, tout comme la veille, Il est resté droit dans ses souliers quant aux missions qu’il a  effectuées avec son binôme, le sergent Lamoussa Badoum. A l’en croire, ils n’ont utilisé aucune violence pour procéder à l’exécution desdits missions et que leur visite à Savane FM était d’arrêter une radio qui émettait illégalement.

Le sergent Hamidou Pagbelem se tenait de nouveau face au tribunal hier mercredi pour relater ce qu’il a fait durant le coup d’Etat de septembre 2015. Les questions du parquet et des avocats des parties civiles ont tourné autour des missions effectuées par l’accusé et le rôle qu’il a joué au cours desdites missions. Bien entendu, il n’est pas revenu sur sa déclaration selon laquelle il ne reconnait pas les faits qui lui sont reprochés ; même s’il reconnait avoir effectué des missions à la radio Oméga FM et à la radio Savane FM. Accusé donc par le directeur général de la radio Oméga d’alors de menace à son encontre, l’accusé dit ne pas se retrouver dans ses déclarations. Il faut rappeler qu’au moment des faits, des éléments du RSP ont fait irruption dans ladite radio afin d’interrompre l’émission. Ils ont menacé le directeur avec une arme et ont même procédé à des tirs en l’air avant d’incendier des motos appartenant au personnel de la radio, a déclaré le directeur. Une déclaration citée par le procureur militaire. L’accusant niant les faits, ne va pas convaincre le procureur militaire : « c’est vous qui êtes allez chez lui. Si vous êtes resté au camp, il n’allait pas vous accuser », soutient-il. Par ailleurs, le sergent nie avoir posé les actes pour lesquels il est accusé. Il va confier n’avoir effectué d’autres missions en dehors des deux radios et centres d’émetteur. Le parquet militaire ne partage pas cet avis. Afin de prouver la mauvaise foi du sergent Hamidou Pagbelem, il va citer le DG de l’ARCEP de l’époque, qui accuse le sergent et deux de ses frères d’arme d’avoir saccager les locaux de l’ONATEL dans le but de couper Internet.

Pour montrer la culpabilité du prévenu, il va rappeler que malgré le communiqué du chef d’état-major général des armées, le général Pingrénoma Zagré, au moment des faits, le sergent a fait fi de cela et est resté à son poste jusqu’à la veille de l’assaut des éléments venus des autres garnisons du pays. Il faut rappeler que ledit communiqué donnait jusqu’au 22 septembre aux éléments de l’ex-RSP, de quitter le camp Naaba Koom II et de rejoindre leur lieu d’affectation. A la question du ministère public de savoir pourquoi l’accusé est resté jusqu’à la veille de l’assaut avant de plier bagages, il va répondre en ces termes : «dans mon service, le sergent est le moins gradé. Je ne peux pas quitter mon poste tant que mes supérieurs sont toujours là». Il va soutenir d’ailleurs que s’il a quitté le camp, c’est sur ordre de son supérieur hiérarchique, le major Harouna Tarpaga. Une fois de plus, il ne va pas réussir à convaincre le parquetier qui va lui rappeler qu’il avait déclaré devant la barre qu’exécuter des ordres constitue la force de l’armée. Se basant sur cette déclaration de l’accusé, il va conclure qu’il se contredit. Il s’explique en soulignant que le communiqué demandant aux éléments de l’ex-RSP de quitter le camp avant le 22 septembre, a été fait par le plus haut gradé de l’armée et par conséquent, poursuit-il, il devait exécuter et rejoindre son nouveau corps d’affectation. Pour le procureur s’il est resté alors que certains de ses frères d’arme ont quitté le camp, c’est simplement pour soutenir ceux qui sont restés pour contrer l’assaut. Ne partageant pas l’avis du procureur militaire, le transmetteur va indiquer que les affectations se font par note et non par communiqué.

Prenant la parole, Me Ignace Tougouma va déclarer que le sergent Hamidou Pagbelem fait partie de ceux dont leur témoignage est clair. Pour preuve, il souligne que ses témoignages concordent avec ceux du sergent Lamoussa Badoum avec qui il a effectué les missions. Croyant à la sincérité de ce dernier, il va déclarer : « je ne vois pas pourquoi il faut chercher des poux sur une tête rasée. Mon client n’a pas fait le choix d’un camp. Il est resté au camp jusqu’au 28 car il n’avait pas eu l’accord de  ses supérieurs hiérarchiques pour partir, contrairement à ce que dit la partie civile qui estime qu’il est resté pour apporter son soutien aux putschistes ». Il va poursuivre en reconnaissant que le 16 septembre, son client avait appris à travers les informations sur les radios que les autorités de la Transition ont été arrêtées. Cependant relève-t-il,  il ignorait qu’il s’agissait d’un coup d’Etat. « De même, il ne savait pas que les missions qu’il effectuait entraient dans le cadre du putsch », a-t-il soutenu.

La 108. 0 FM, la

radio illégale !

L’avocate de la défense, Me Zaliatou Aouba va apporter son soutien à l’accusé et son conseil en indiquant que si l’on reproche au sergent Pagbelem d’avoir agi dans l’illégalité pour avoir arrêté la 108.0 FM, la radio Savane FM était aussi dans l’illégalité. Elle justifie ses propos par le fait qu’elle a permis à une autre radio d’utiliser ses locaux et son matériel pour émettre sur une fréquence illégalement obtenue. Le parquet militaire bien que partageant son avis, va lui rappeler ceci : « on ne répare pas une illégalité en créant une autre ». Si un peu plus haut, le sergent a déclaré avoir exécuté des ordres militaires en effectuant les missions tout en indiquant n’avoir pas pris part au coup d’Etat ; Me Haoua Sawadogo des parties civiles ne partage pas cet avis. Elle estime qu’il y a un lien, une connexion évidente entre le saccage de Savane FM et le coup d’Etat. Pour elle, c’est parce que cette radio appelait à la résistance face au putsch qu’elle a été visitée par les éléments du RSP ; contrairement à ce que veut faire croire l’accusé. Sûr donc de son analyse, elle a invité le tribunal à constater ces faits qu’elle estime très clairs. L’audience reprend demain vendredi 31 août 2018, au tribunal militaire.

Boureima Sawadogo et Edoé MENSAH-DOMKPIN

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