Procès putsch manqué : Le caporal Dah Sami indexe les sous-off

Procès putsch manqué : Le caporal Dah Sami indexe les sous-off

Hier, c’était le tour du caporal Dah Sami d’être rappelé à la barre pour son audition complémentaire dans le procès du putsch manqué du 16 septembre 2015. Le militaire du rang a maintenu sa déposition. Mieux, il identifie clairement les sous-officiers supérieurs du RSP comme étant les instigateurs du coup d’Etat, tout en justifiant ses propos.

Le caporal Dah Sami est mêlé au coup d’Etat, parce qu’il a exécuté des ordres que lui a donnés le sergent-chef Roger Koussoubé dit le Touareg. C’est le soldat du rang qui l’a dit à la barre ce mercredi 23 janvier 2019, pour se défendre, concernant sa participation dans cette affaire.  Il explique que c’est le sergent-chef qui lui a demandé de venir au camp, sous prétexte que l’adjudant Jean Florent Nion  veut les voir en compagnie du sergent- chef  Mohamed Zerbo. Le prévenu raconte qu’à son arrivée, il a embarqué dans le convoi qui s’est rendu à la présidence pour interpeller les autorités de la transition parce qu’il a vu Roger Koussoubé dans l’un des véhicules et rappelle par la même occasion qu’il est un caporal et qu’un caporal n’a pas de pouvoir de décision dans l’armée. S’il reconnait s’être rendu à la présidence, il réfute l’accusation selon laquelle, il a participé à l’arrestation des autorités. Accusé par l’adjudant Nion qui a confié qu’il était arrêté devant la porte de la salle du Conseil des ministres et qu’après il y est entré, il dit qu’une fois arrivé à la présidence, il a rebroussé chemin parce qu’il n’a pas retrouvé celui qui l’a appelé. Selon ses explications, c’est une fois reparti au camp, qu’il a été affecté à la sécurité du général Gilbert Diendéré par le sergent-chef Koussoubé. Accusé également par la plupart des officiers qui disent l’avoir identifié  dans le bureau du chef de corps avec une arme au cours de la réunion des officiers, le prévenu réfute catégoriquement cette accusation. Il indique que faisant partie de la sécurité du général, il l’a accompagné à la réunion des officiers, mais souligne qu’il n’est pas entré avec lui dans le bureau en question et qu’il est resté au secrétariat. Pour lever tout doute pour ce qui est de sa présence dans ledit bureau, Dah Sami note que Golf, lors de sa comparution, avait soutenu qu’il ne l’a pas vu dans le bureau.

Six millions comme récompense pour avoir déjoué un coup d’Etat ?

On se rappelle que lors du passage du sergent-chef, Roger Koussoubé, il était question d’une somme de huit millions, que le sous-officier supérieur n’a pas souhaité  commenté. Invité à se prononcer là-dessus, le caporal souligne que ce n’est pas huit millions, mais six millions qui lui appartiendrait  et qui lui ont été remis par le capitaine Flavien Kaboré, un proche du lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida. Il explique que la somme lui a été remise en deux tranches, soit trois millions deux fois. Pour se justifier, l’accusé confie  que le 8 juillet 2015, il  a informé par message, ce proche de Zida, d’un mouvement d’humeur de sous-officiers de l’ex-RSP qui voulaient mettre fin à la transition, ce qui a permis d’exfiltrer le premier ministre  et le colonel Auguste Denise Barry, ministre de la Sécurité. A l’en croire, c’est après cet épisode, que le capitaine Flavien Kaboré lui a remis trois millions de francs CFA de la part du premier ministre. C’est cette première somme, qu’il dit avoir remis à son supérieur hiérarchique, le sergent-chef Roger Koussoubé qui, après s’être référé à la hiérarchie, l’a rassuré qu’il pouvait les dépenser. Il confirme que par la suite, le même capitaine lui a ajouté encore  trois millions. Ainsi donc, après réflexion, il s’est dit que ce geste du lieutenant-colonel Yacouba Isaac Zida, était sans doute pour le remercier de l’acte qu’il  a posé  au paravent. Pour mettre fin au débat concernant l’argent reçu, il déclare : «c’est mon argent. C’est six millions et non huit millions et ils ne sont pas à Koussoubé, mais à moi».

«Les planificateurs du coup d’Etat sont les sous-officiers supérieurs»

A la question de savoir qui sont les planificateurs du coup d’Etat, le militaire à la barre affirme que ce sont les sous-officiers supérieurs du Groupement des unités spéciales (GUS) et déclare que le sergent-chef Roger Koussoubé devait être au courant ; «sinon il n’allait pas m’appeler», a-t-il soutenu. En paraphrasant Koussoubé, il explique que  l’adjudant Nion a vérifié une information auprès du général, sans dire de quoi s’agissait-il exactement. L’analyse faite par le soldat est qu’ils ont inventé cette histoire pour amener les hommes à les suivre et que le général allait assumer la paternité.

Dans ses confidences, le caporal Dah Sami souligne que les sous-officiers supérieurs étaient devenus aigris du fait que le premier ministre  Zida avait écarté  tous ceux qui ont été dans la garde rapprochée de l’ex-président du Faso, Blaise Compaoré. D’après lui, ces sous-officiers supérieurs qui ne  digéraient  pas cette décision  ont décidé d’en finir avec le PM.

«Un procès pas pour rechercher la vérité, mais, pour  nuire à un seul individu»

A la suite des questions du parquet militaire, la parole a été donnée au conseil de l’accusé, Me Antoinette Boussim. Rappelant que le second passage à la barre de son client est une audition complémentaire, elle fait remarquer au parquet militaire, qu’il est en train de poser des questions sur des sujets déjà traités. Pour elle, au début, elle pensait que le procès avait pour but de connaitre la vérité sur ce qui s’est passé, mais, elle constate malheureusement que c’est la tête de quelqu’un qui est recherchée et cite «Gilbert Diendéré». L’avocate rappelle que son client se bat pour lui et non pour quelqu’un.  Tout en rappelant qu’il est resté constant dans sa déposition, elle souligne qu’il va continuer de se battre pas parce qu’il veut noyer quelqu’un ou parce qu’il veut sauver quelqu’un.

La réplique des parties civiles

Les propos de Me Antoinette Boussim passent mal au niveau des avocats des parties civiles qui n’ont pas tardé à répliquer. En effet, Me Lassané Pierre Yanogo  déplore les propos de sa consœur. D’après lui, cela fait un an que les différentes parties viennent au procès dans le but de connaitre la vérité. Malheureusement regrette-il, les gens sont incapables de dire la vérité. Pour lui,  chacun est dans son rôle. Rappelant que Me Antoinette Boussim  n’est pas constituée aux côtés du général Gilbert Diendéré, il conclut en disant : «Si elle avait dit que l’on cherche la tête de son client, il allait comprendre». Dans la même logique que son confrère, Me Haoua Sawadogo qualifie les propos du conseil du caporal d’une fuite en avant.  Nous sommes pour du sérieux, a-t-elle indiqué, avant d’inviter l’avocate à ne pas banaliser le procès. «Si on est là depuis un an, c’est pour la manifestation de la vérité», a-t-elle conclu.

Le soutien des conseils de la défense à Me Antoinette Boussim

           

Ne partageant pas les observations des parties civiles, certains avocats de la défense ont réagi en apportant leur soutien à Me Antoinette Boussim. Ne comprenant pas pourquoi les conseils des parties civiles s’offusquent contre les observations de l’avocate, Me Mamadou Sombié quant à lui, pense que  ce sont des débats qui ne méritent pas d’être menés. Pour lui, Me Antoinette a le droit de préparer sa défense comme elle le veut et les parties civiles également. Cependant confie-t-il, les parties civiles n’ont pas le droit d’utiliser les propos de l’avocate contre elle. Lui apportant clairement son soutien, il déclare : «je m’inscrit dans sa logique. Moi j’ai aussi  l’impression qu’on cherche certains pour les châtier». L’audience reprend demain à 9 heures dans la salle des banquets de Ouaga 2000 avec à la barre le sergent-chef  Laoko Mohamed Zerbo.

Boureima SAWADOGO et Edoé MENSAH-DOMKPIN

COMMENTAIRES

WORDPRESS: 0
Aujourd'hui au Faso

GRATUIT
VOIR