Putsch manqué : L’adjudant Nion l’attribue au général Diendéré

Putsch manqué : L’adjudant Nion l’attribue au général Diendéré

Nouveau rebondissement dans le dossier du putsch manqué du 16 septembre 2015. En effet, c’est le général de brigade Gilbert Diendéré qui serait le commanditaire du coup d’Etat. L’accusation a été portée contre lui par l’adjudant Jean Florent Nion et l’adjudant-chef major Eloi Badiel ce lundi 21 janvier 2019, à la reprise de l’audience comptant pour la seconde phase des auditions qui va concerner cinq accusés.

L’on se demande si le ciel n’est pas en train de tomber sur la tête du général de brigade Gilbert Diendéré. Depuis le début de ce procès, aucun  accusé n’a accepté endosser la paternité du coup d’Etat. Confiant lors de leur premier passage à la barre en juillet dernier qu’ils ont reçu un message du général par l’intermédiaire du sergent-chef Roger Koussoubé de faire un putsch, les deux sous- officiers de l’ex-RSP ont  apporté des éléments nouveaux pour étayer leurs dires. L’adjudant Jean Florent Nion et  l’adjudant-chef major Eloi Badiel ont clairement accusé le général d’être le commanditaire du coup d’Etat à leur second passage devant le tribunal. Pour l’adjudant Nion,   il s’inscrit totalement en faux concernant ces déclarations du général Diendéré : «je n’ai ni organisé, ni commandité, ni exécuté, ni planifié un coup d’Etat». Confiant qu’effectivement ce dernier n’a pas exécuté le coup d’Etat, il assure qu’il l’a néanmoins commandité. Visiblement remonté contre son supérieur hiérarchique, il déclare : «il a écouté tout le monde et il est venu dire ce qu’il veut». «J’ai été victime de tension à cause de ce qui se raconte au procès et quand vous écoutez ce qui se dit, ça fait mal». A l’en croire, le 16 septembre, personne n’avait en tête, un coup d’Etat, sauf le général Gilbert Diendéré et le sergent-chef Roger Koussoubé qu’il accuse d’ailleurs, d’être le porteur de message. De façon très brève, il a rappelé les circonstances dans lesquelles, ce dernier lui a annoncé que le général a ordonné de faire un coup d’Etat et confie qu’ayant eu connaissance du projet, il a envoyé un message au général pour confirmation. Profitant de cette seconde chance pour dire ce qui s’est réellement passé lors des évènements, il s’est retourné vers le sergent-chef en lui rappelant qu’il est en train de jouer à un jeu dangereux : «si Koussoubé veut sacrifier sa vie et celle de sa famille pour de l’argent moi, je ne le ferai pas». Par ailleurs, l’accusé a laissé entendre que son regret est que ‘’Golf’’ n’a pas tenu parole malgré la souffrance des éléments qui ont été arrêtés et détenus de par sa faute.

Pour l’avocat de Nion, Koussoubé était l’homme de confiance  de Diéndéré

Venant à la rescousse de son client, Me Adrien Nion a laissé entendre que : «Si quelqu’un a  le courage  de dire de faire quoi que ce soit, qu’il ait également ce même courage d’assumer sa responsabilité». Selon lui, le général Diendéré est passé par le sergent- chef Roger Koussoubé pour transmettre son message à ceux qui devaient mener l’opération. «Il ne pouvait  pas passer par quelqu’un d’autre pour apporter son message», assure t- il. Pour corroborer ses dires, il cite son Procès- verbal (PV) dressé en Côte d’Ivoire lors de son arrestation. A entendre, l’avocat, lorsqu’on lie ce PV d’interrogatoire, on se rend compte de la promiscuité des relations qui existaient entre les deux hommes. Tout en assurant au président du tribunal que lui et son client sont là rien que pour dire  la vérité, il  fait observer qu’il n’y a pas deux lectures à faire dans ce dossier, mais plutôt une seule. Cependant, quant à Me Alexandre Sandwidi, avocat du sergent- chef Koussoubé dit le Touareg, c’est un pur montage de dire que c’est son client qui a été le porteur du message de celui qui deviendra par la suite, le président du Conseil national pour la démocratie (CND). Si tel était le cas, pourquoi ne l’aviez- vous pas mis aux arrêts ? se demande l’auxiliaire de justice. S’adressant au major  Badiel et à l’adjudant Nion, Me Alexandre Sandwidi  estime qu’ils se sont concertés pour tout mettre sur la tête de son client qui était   en exil après l’échec du putsch du 16 septembre 2015.  N’accordant aucun intérêt aux déclarations du sous- officier supérieur de l’ex- Régiment de la sécurité présidentielle (RSP), lesquelles déclarations, d’après lui, ont varié, le conseil du «Touareg» déclare : «Vous ne pouvez pas vous prévaloir de la variation et de la versatilité de vos déclarations et prétendre qu’on y accorde du crédit». Par ailleurs, notons que  le mercure est monté par moments entre des avocats de la défense à cette audience qui marquait le début d’une seconde phase d’interrogatoire. D’une part, il y avait les avocats du général Gilbert Diendéré et du sergent-chef Roger Koussoubé et d’autre part, ceux de l’adjudant- chef major Eloi Badiel et l’adjudant Jean Florent Nion. Pour ce faire, le président du tribunal Seidou Ouédraogo a dû intervenir à maintes reprises, pour demander à certains de  retirer leurs propos, tout en menaçant l’un d’eux de lui retirer la parole s’il tenait à répliquer aux pics qu’il a reçus de la part de son détracteur.

«C’ n’était pas un mouvement d’humeur, mais un coup d’Etat»

Le premier à passer à la barre, ce lundi 21 janvier 2019 est L’adjudant-chef-major Eloi Badiel. Lui également a confié que c’est le sergent-chef Roger Koussoubé qui lui a porté l’information du général Gilbert Diendéré et qu’à deux, ils sont allés informer l’adjudant Nion. Si certains refusent de parler de coup d’Etat et préfèrent parler de mouvement d’humeur, l’accusé n’est pas de cet avis et déclare contrairement à certains coaccusés que : «ce n’était pas un mouvement d’humeur. L’ordre a été donné de faire un coup d’Etat». Concernant les propos du général qui refuse d’assumer sa responsabilité, le prévenu déclare : «je ne peux juger le général Diendéré. Ce qu’il a dit n’engage que lui et c’est au tribunal d’apprécier». Tout en reconnaissant avoir donné des ordres durant les évènements, il estime qu’il ne servait que d’intermédiaire. Prenant par exemple la mission qui consistait à arrêter les émetteurs des  radios Oméga et RFI, il accuse le capitaine Abdoulaye Dao de l’avoir  instruit de contacter des éléments pour exécuter ladite mission. Le sous-officier est catégorique : «c’est sur ordre, que j’ai fait exécuter. Ce n’est pas d’initiative personnelle». A la question de Me Ali Néya de savoir si l’adjudant-chef major Eloi Badiel a fait ce coup d’Etat pour lui ou pour le général Gilbert Diendéré, il affirme qu’il n’est pas politicien.

Les observations du conseil de l’accusé

S’alignant dans la même logique que son client, Me Bertin Kiénou rappelle qu’il n’a aucune connaissance en politique, contrairement au général Gilbert Diendéré qui est venu énumérer des raisons politiques pour expliquer le coup d’Etat, a-t-il soutenu. Continuant avec ses observations, l’homme de droit fait observer  qu’il a été dit à la barre que le soir du 16 septembre, des autorités de la transition ont été libérées et que c’est sur instruction du général. Pour lui, c’est une preuve que l’adjudant-chef major Eloi Badiel n’a pas d’autonomie décisionnelle. Pour prouver que c’est le général qui est l’auteur du coup d’Etat, l’avocat souligne que le général en arrivant au camp, n’a pas demandé aux éléments du RSP d’arrêter l’opération, mais a demandé aux officiers de l’accompagner et non d’accompagner le major Badiel. Se basant donc sur ce fait, il déclare : «qu’on ne cherche pas à nous faire croire que l’ordre du coup d’Etat ne vient pas du général». «Que ceux qui ont pensé l’opération assument», a-t-il soutenu, avant d’ajouter que c’est le général qui est le commanditaire et que c’est lui qui a donné les instructions. D’après lui, le major Badiel a choisi de dire la vérité. Cependant il note que celui- ci pouvait tout nier à la barre  du fait que les instructions qu’il a reçues sont d’une extrême gravité. L’audience se poursuit ce matin avec d’autres accusés à la barre.

Boureima SAWADOGO et Edoé MENSAH-DOMKPIN

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