Référendum constitutionnel pour un 3e mandat en RCA : Touadéra, l’apprenti sorcier

Référendum constitutionnel pour un 3e mandat en RCA : Touadéra, l’apprenti sorcier

On peut très bien manier le théorème de Pythagore, résoudre l’équation de Shorindinger avec aisance, bref être un grand expert des mathématiques pures et pourtant se gourer en politique, et surtout se méprendre sur la trajectoire de l’histoire contemporaine.  Cela semble être le cas du chef de l’Etat centrafricain Faustin Archange Touadéra qui du haut de sa chaire de professeur de maths pures, veut charcuter la constitution via un référendum pour s’offrir un 3e mandat, après le  présent qui est le second et ultime, selon les prescriptions de la loi fondamentale.

Son argument aussi puéril qu’éculé est que les «aspirations du peuple, c’est un référendum constitutionnel» audible selon lui, depuis la tenue du dialogue républicain en mars.

Pour Touadéra, il faut toiletter «le corpus juridique qui n’est pas immuable, et qui doit suivre les «évolutions sociales, politiques, techniques…».

«Je ne ferai rien sans la volonté du peuple détenteur de la souveraineté nationale», a-t-il martelé.

Vieille ficelle usée par tous les satrapes, timoniers et autres adeptes du 3e mandat, qui s’arc-boutent derrière le soi-disant peuple, en vérité quelques partisans du parti, payés avec quelques expédients qui simulent des objurgations pour que le leader reste, rempile, car après lui au mieux les chantiers du pays s’arrêteront, au pire c’est le chaos.

En RCA Touadéra a répliqué le scénario, sans même chercher à convoquer l’histoire récente, ou éloignée. En 2011, Ben Ali était à son 5e mandat, mais quand la bourrasque printanière a commencé à souffler, il a clamé que c’est son dernier mandat hélas trop tard ! Au Burkina Faso, Blaise Compaoré homme d’Etat averti, avait le droit de faire un 3e mandat, il n’a pas pu. Qui ne se souvient pas de Mamadou Tandja du Niger qui fut aussi un leader et qui avait exhibé le Tatzarché, et il a été renversé lui aussi. Alpha Condé de Guinée a obtenu au forceps son 3e mandat, en violentant la Constitution par un référendum constitutionnel, il le regrette aujourd’hui quelque part en Turquie où exilé médical, il ressasse sans doute son parcours d’apposant, puis de faux démocrate.

Les exemples foisonnent pour dissuader Touadéra qui d’ailleurs ces derniers temps multiplie les bourdes, notamment cette histoire de cryptomonaie dans un ex-Oubangui-Chari où 7/10 habitants vivent dans une pauvreté crasse, où l’électricité est rare dans les localités, pour des opérations liées à cette monnaie numérique, et où le paysan Gbaya ou Sango comprend quedal, la cryptomonnaie qui est aussi une tentative de pied de nez à la CEMAC, au FMI et à la Banque mondiale.  Dans une RCA où n’eut été la présence des Rwandais et des Russes qui vivent sur la bête, n’eut été ces supplétifs des FACAS, lui-même Touadéra aurait déjà été emporté, son pouvoir ne se limitant jusqu’à une époque récente qu’au palais de la Renaissance et aux faubourgs de Bangui.

Toute ces dérapées sont symptomatiques de l’ivresse du pouvoir de l’actuel chef de l’Etat et du fameux culte de l’indispensabilité que cultive désormais cet homme affable, animé par une sorte de bonhomie, mais qui est pris par le vertige du trône.

C’est un sentier dangereux qu’il emprunte dans un pays sous tutelle, gangrené par une kyrielle de rebellions et de politiciens revanchards. En tout cas une partie de ses compatriotes se sont déjà mis au travers de cette velléité de 3e mandat. Si l’ex-premier ministre Martin Ziguelé parle «d’escroquerie politique» à ce sujet, le Bloc républicain, contre un 3e mandat, un FNDC version centrafricaine, qui regroupe aussi des partis politiques et des organisations de la société civile (une vingtaine) ont lancé le 22 juillet dernier un vaste mouvement pour empêcher cette tentation de pouvoir à vie qui gagne Touadéra.

Un président centrafricain, qui n’ignore pas qu’il est à la tête d’un Etat failli, dont les fondamentaux sont soutenus par l’étranger, Touadéra sait-il seulement qu’il joue à l’apprenti sorcier en la matière ?  

La rédaction

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