L’équipée punitive débutée 4 novembre 2020 du premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed contre le Tigré sécessionniste et rebelle a-t-elle accouché d’un feu de paille et surtout de massacres, sans atteindre l’objectif de récupérer le patelin du TPLF ? La question trotte dans les têtes des dirigeants de l’Etat fédéral, à Addis-Abeba, après la reprise le 28 juin dernier de la capitale Mékélé par les autonomistes tigréens.
Les scènes de soldats éthiopiens pourchassant des Tigréens et assimilés, à Mékélé et autres localités se sont inversées, et depuis lundi dernier, ce sont les rebelles du Tigré qui sont de nouveau maîtres chez eux. Sources locales, militaires, médiatiques et diplomatiques le confirment, les «youyou» des populations dans les rues de Mékélé pour saluer la reprise de la ville par le TPLF, sont des preuves vivantes.
C’est un dur retour de manivelle pour Ahmed Abiy, auréolé de son prix Nobel, et surtout attendant sa victoire certaine aux élections du 21 juin dernier, car dans cette guerre «fermée» qui a fait des centaines de victimes, loin des témoins (journalistes, ONG …) la dernière en date étant cette salve qui a tué 64 personnes et blessé 180 dans un marché le 22 juin 2021 les informations restées éparses et non-avérées. Ça sent la déculottée même si elle est peut-être provisoire pour Ahmed Abiy qui avait juré de mâter totalement ces irrédentistes tigréens, et on est enclin à croire qu’Addis Abeba écrase le coup, quand d’une attitude va-t-en guerre, elle proclame unilatéralement un arrêt des hostilités, et surtout se claquemure dans un silence pourtant assourdissant, synonyme d’une perte de bataille. Sans oublier Shiré qui a été aussi reprise, autre ville qui n’a pas accepté le joug d’Addis Abeba.
Même l’allié, ancien ennemi l’Erythrée, qui a épaulé les forces fédérales éthiopiennes, s’est simplement fendu d’un communiqué via Twitter pour dire que la guerre continue. C’est que le rais érythréen Isaias Afwerki a compris aussi que ce Tigré-là était coriace à mâter, surtout à rentrer dans le giron d’Addis. La bataille de Mékélé a bien eu lieu, mais 8 mois après, la seconde est bien là, et elle est à l’avantage des Tigréens, dont le porte-parole Getachaw Reda, à l’instar d’un Poutine qui disait qu’il pourchasserait les Tchétchènes «jusque dans les chiottes», le TPLF est prêt à ratisser contre les troupes fédérales jusqu’à Amhara et même chez Afewerki !
De chasseurs, les soldats éthiopiens deviennent la proie, et cette situation va compliquer la donne socio-politique au pays du Negus Haïlé Selassié, surtout d’un Ahmed Abiy, désormais transi militairement, et risquant de l’être politiquement, même avec sa victoire annoncée aux dernières élections. OVNI politique de par ses origines oromo, et parachuté à la primature où beaucoup de ses compatriotes lui ont fait crédit de réussir la greffe entre les différentes forces politico-ethniques, le prix Nobel 2019 a semblé prendre ce pli, mais la bifurcation guerrière suivie de cette défaite de Mékélé, pourraient mettre fin à cette ascension météoritique. Assurément, ce qui ressemble à une débâcle de Mekele sera un gros caillou dans le soulier du premier ministre éthiopien.
Et peut-être que pour sauver la face, il lui faudra écouter les voix internationales émanant des Etats-Unis, du Royaume Unis, de la France, des Emirats Arabes Unis et de l’ONU, tous appelant à une solution politique. Mais laquelle ? Encore faut-il que les belligérants le veuillent ! Et que le Nobel-guerrier daigne arrêter sa velléité hégémonique !
La REDACTION
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