Restitution des biens culturels à l’Afrique : Pourvu que le définitif domine le temporaire

Restitution des biens culturels à l’Afrique : Pourvu que le définitif domine le temporaire

90 000 biens culturels appartenant à l’Afrique tapissent les musées de la France. C’est ce que dit le rapport de Felwine Sarr et Bénédicte Savoy. Il a été écrit dans le cadre de la restitution des biens culturels africains. Le rapport, commandité par le président français, Emmanuel Macron, lui sera remis ce 22 novembre 2018. Il doit sur cette base, mettre en œuvre la promesse qu’il a faite à Ouagadougou, de restituer à l’Afrique ce que la France lui a pris en termes de biens culturels pendant la colonisation.

Ce 28 novembre 2017, soit il y a presque un an, le chef d’Etat français estimait un délai de cinq ans pour retourner à l’Afrique ce qui lui était dû et définissait son identité et sa richesse culturelles. Est-on à la veille de la tenue de cette promesse ? Possible. Et ce serait louable de la part des descendants des anciens «colonisateurs» de reconnaître que leurs arrières grands-parents ont fait du tort aux aïeux des Africains actuels, en leur confisquant les entrailles de ce qui les définissait.

Lorsqu’on retire à un peuple ses traits culturels, on le défigure et on le rend méconnaissable pour le présent et la postérité. Cela faisait sans doute partie de cette œuvre de «civilisation» que les «colons» d’alors ont jugé importante pour les peuples d’Afrique. Une «civilisation» imposée qui ne répondait pas forcément aux aspirations des «sauvés» et dont on n’avait pas (et pas sûr qu’on l’a encore aujourd’hui) les preuves de la certitude qu’il leur ferait du bien. C’est de bonne guerre par conséquent si la France d’aujourd’hui accepte reconnaître cette injustice faite par la France d’hier et fasse suivre cette reconnaissance par des actes concrets en restituant ces œuvres qui ne lui appartiennent pas à ses propriétaires séculaires.

Mais déjà, des terminologies viennent un peu de ce beau tableau. Il est question en effet de «restitutions définitives» et d’autres «temporaires». L’on peut comprendre que les œuvres soient retournées à leurs propriétaires. Que des objets, visiblement déplacés et anachroniques dans les galeries françaises, reviennent dans leur biotope d’origine est d’une logique compréhensible. Mais quelle est cette autre gymnastique qui consiste à les faire revenir à nouveau dans ces antres où qui ne sont véritablement pas leur place ?

Ou on restitue ou on ne le fait pas. Cela ne sert à rien de ramener un colis à son propriétaire pour ensuite le reprendre. Ce serait une autre injustice qui ne voudrait pas dire son nom. Il est compréhensible que le départ de 90 000 œuvres des musées français créera un gros vide sur les étalages qui devront trouver le moyen de se faire à nouveau valoir. Mais le commun des mortels «civilisés» est aujourd’hui unanime, la colonisation en Afrique a été «un crime contre l’humanité» (ces mots sont du Président français lui-même). Alors, l’unanimité sur la permanence de la cessation de ses conséquences encore visibles ne doit plus faire l’objet de tergiversations.

Ahmed BAMBARA

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