Retour de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire : Abidjan  en apnée, en attendant le «Woody de Mama»

Retour de Laurent Gbagbo en Côte d’Ivoire : Abidjan  en apnée, en attendant le «Woody de Mama»

Suspense. De petites questions trottinent dans le recoin de certaines têtes, demandant «viendra-t-il vraiment ?», «foulera-t-il réellement le sol ivoirien» ? Mais sauf cataclysme de dernière minute, Laurent Gbagbo, le Woody de Mama, descendra bien en Eburnie, en passant par l’escalier aérien. Et summum des honneurs, il passera par le pavillon présidentiel ! D’enfer Gbagbo est revenu à Abidjan !

Car in petto ceux qui l’y ont envoyé pensaient que peu ou prou, il ne reviendrait plus jamais ! Quelle ironie du sort !

Lorsqu’à 66 ans, les traits tirés, les yeux fixés sur un avenir incertain, il décollait de l’aéroport ivoirien pour la destination CPI après avoir été reclus pendant des mois à Korhogo, il n’y avait pas autant de panache. Il partait, la réputation à l’œil au beurre noir, en catimini, rasant les parois des couloirs aériens, et applaudi par des mains vindicatives et des paroles qui juraient enfin sa fin. Lorsqu’à 66 ans, il franchissait le seuil des larges battants de la Cour pénale internationale (CPI), ils n’étaient pas nombreux à gribouiller leur fortune sur le  tableau du pari de son retour. Il allait peut-être revenir, oui. Mais pas de sitôt, mais surtout, pas de cette manière !

Pourtant, Laurent Gbagbo et son retour sont aujourd’hui sur toutes les lèvres, au point d’éclipser le président de la république lui-même, en termes de popularité. Son nom frémit sur les langues de ses partisans tout comme sur celle de tous ceux qui n’applaudissent pas son retour. Car, oui, le «Woody de Mama» n’est pas dans tous les cœurs, surtout ceux de ceux qui scandent et demandent la justice. Ceux de ceux qui réclament lumière et recherchent comme la tête chercheuse d’un missile teigneux, le responsable de ces trois milliers de macchabées, de  ces estropiés mentaux et physiques à vie et  de ces orphelins interrogateurs. Car, oui, il manque toujours un responsable pour répondre présent à l’appel de la responsabilité de ce drame humain qu’a mis au monde la crise post-électorale de 2010-2011, et qui aura fait 3 000 victimes.

C’est du reste l’une des manches du manteau d’obscurité qui couvre les contours de ce come-back de Gbagbo en Eburnie. Certes, Alassane Ouattara a «acheté» le rendez-vous du 17 juin 2021, avec pavillon présidentiel et résidence assurée. Mais quel service-après-vente préconise-t-il ? Qu’est-ce que la justice compte faire de cette autorité de la chose jugée et qui devrait envoyer normalement le ferment spirituel du FPI ? Laurent Gbagbo ira-t-il à la prison de son pays après avoir quitté celle de la Haye ? Non ? Alors, comment va-t-on s’y prendre pour décanter cette jurisprudence ?

Comment Alassane Ouattara pense-t-il gérer le courroux des citoyens ivoiriens qui  réclament justice à cor et à cri et qui pourraient se livrer à des actes aux conséquences regrettables ? En attendant, le même Ouattara décolle aujourd’hui même 17 juin pour Paris.

Et puis, quels sont les desseins du fondateur du FPI lui-même ? Compte-t-il rester dans la politique, mais comme une sorte de père spirituel sans grandes ambitions présidentielles en mettant en orbite Blé Goudé ou Affi N’Guessan ou va-t-il se lancer dans un dernier sprint pour tenter à nouveau de rentrer au palais présidentiel ivoirien ? Difficile de croire et de penser que Laurent Gbagbo puisse revenir s’assoir «tranquillement» ou prendre «sa retraite», loin du bouillonnement de la classe politique. Au cas où d’ailleurs, il se décide de se mettre à carreau, comment compte-t-il ne pas entendre ces appels du pied que ne manqueront pas de lui lancer ses partisans ?

Que de questions ! Des interrogations en vagues qui obligent la Côte d’Ivoire à retenir son souffle, tout un pays en apnée, attendant le «Messie» frontiste et attendant de voir aussi quelle coloration vont bien prendre les rives de l’Ebrié ce 17 juin jour pas comme les autres.

Ahmed BAMBARA

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