Le Sahel est meurtri. Le staccato des armes des terroristes sous treillis djihadistes passés par-dessus des justaucorps de narcotrafiquants le dispute à la pauvreté rampante qui crée des frustrés, recrues rêvées qui tombent comme des fruits trop mûrs dans l’escarcelle des semeurs de terreur. Pendant ce temps, les dirigeants africains courent de réunions en réunions, essayant tant bien que mal que trouver la solution médicamenteuse qui chassera les bactéries qui ont élu domicile dans le giron des pays du G5-Sahel.
C’est le cas de cette rencontre spéciale et extraordinaire qui s’est tenue à New York, hier 25 septembre 2019 en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, pour parler du grand malade du Sahel central aux dunes et sillons ensanglantés et en proie aux appétits et convoitises les plus inavoués.
Mais que changera vraiment cette autre réunion, cette assemblée de plus dans le concert des jamborées qui lévitent au chevet du drame du Sahel ?
Le cénacle new-yorkais d’hier codirigé par Roch Kaboré du Burkina et IBK du Mali qui a regroupé le SG de l’ONU, le président de la Commission de l’UA, les ministres des Affaires étrangères français, algérien et la haute représentante de la diplomatie européenne a visité les mêmes sentiers ressassés lors des réunions précédentes :
Le bouclage du budget du G5-Sahel, qui est de 423 car malgré les promesses des partenaires il tarde à être une réalité.
Concrétiser les décisions du sommet de la CEDEAO de Ouaga du 14 septembre 2019, en étendant la MINUSMA à tout le Sahel et en dotant le G5-Sahel du parapluie onusien (chapitre7).
Enfin, comme l’a répété à maintes reprises Roch Kaboré, l’UA doit être présente permanemment dans ce dossier, avec la nomination d’un envoyé spécial ONU-UA pour la Libye, cette Libye post-Kadhafi est la cause de cette terrorisation des septentrions burkinabè et malien. Un premier nœud gordien qu’il faudra trancher.
Dans ce clapotis de bras de noyé qui cherchent à s’agripper à n’importe quelle aspérité qui se présente, la CMA, la Coordination des mouvements de l’Azawad, a décidé de claquer les portes, déjà pas très solides, de l’Accord d’Alger et de quitter du même coup le salon du dialogue national malien pour se retrouver dans la cour de la bouderie et des griffes sorties. Le véritable enjeu de cette grogne est Kidal. La fameuse Kidal. La raison de ce départ est que le président malien a passé outre l’article 65 du traité pour toiletter certaines dispositions. En clair, selon Moussa Ag Attaher, porte-parole de la CMA, le président malien a décidé de façon unilatérale, de biffer des alinéas dans ledit Accord. La problématique Kidal. L’énigmatique Kidal. Le tabou Kidal qui fait hérisser les poils et retrousser les babines chaque fois qu’il est question ne serait-ce que de l’évoquer.
Pourtant, il faudra tôt ou tard crever l’abcès de Kidal. Résoudre les questions qui enflent de plus en plus et qui interrogent le fait que la force Serval, qui pourchassait sabre au clair les «envahisseurs» du Mali, ait brutalement freiné des quatre fers aux portes de cette ville, refusant à l’armée malienne d’y entrer, tout en ne garantissant pas toutefois l’assurance qu’elle ne servira pas de base arrière pour les bandits de tout acabit qui nuisent, non seulement au Mali qui ne maîtrise pas le nord de son territoire, mais également aux pays frontaliers qui doivent faire face à un repaire d’où partent les colonnes qui nuisent à leur sécurité. Le président nigérien Issoufou finalement excédé, avait il y a quelques jours de cela, nommément indexé Kidal comme l’une sinon la source des problèmes sécuritaires au Mali et dans la sous-région. Bamako a modérément apprécié.
Il faudra crever l’abcès tôt ou tard pour savoir si Kidal fait toujours du Mali ou s’il faut procéder à la création d’un autre Etat ou une fédération ou toute autre éventualité qui éteindra définitivement ce flou qui plane sur la tête de Kidal tel un sombre nuage menaçant sur une vallée apeurée.
Kidal est le second nœud gordien et il faudra avoir le courage de le dénouer. Il en va peut-être désormais pour la quiétude de l’ensemble du Sahel. La réunion de la ville-pomme portera-t-elle fruit ? Croisons les doigts.
Ahmed BAMBARA
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