Roch Kaboré tire le bilan à Shanghai  de sa visite d’Etat en Chine : «Le Burkina s’endettera en Chine de façon responsable»

Roch Kaboré tire le bilan à Shanghai  de sa visite d’Etat en Chine : «Le Burkina s’endettera en Chine de façon responsable»

 C’est à Shanghai la capitale économique de la Chine que le président du Faso a terminé   sa visite d’Etat. C’est dans cette gigantesque mégalopôle qu’il a dressé le bilan de son  séjour. Accords, endettement, coopération sécuritaire …ont été au cœur de cette  première visite, trois mois après le retour du Burkina sur les bords du fleuve  Yang-Tsé.

Au moment où s’achève votre séjour chinois qui comprenait deux aspects majeurs, une visite d’Etat et la participation du Burkina au troisième forum de coopération Chine-Afrique, quel bilan pouvez-vous déjà dresser ?

Nous sommes venus en République populaire de Chine, pays avec lequel nous avons renoué nos relations diplomatiques, il y a à peine trois mois. Nous avons modulé notre présence dans ce pays en deux grandes parties. D’abord, une visite d’Etat, les 31 août et 1er septembre. A la faveur de cette visite d’Etat, nous avons eu un entretien avec le président de la République populaire de Chine, Xi Jinping, qui a permis de faire un large tour d’horizon sur des questions d’intérêts réciproques. Le Burkina Faso a particulièrement évoqué les questions de santé, de l’agriculture avec toutes les implications possibles qu’offre ce secteur. Ainsi, nous avons souhaité que la partie chinoise forte de son expérience dans le domaine de l’agriculture, nous aide à atteindre l’autosuffisance alimentaire, mais nous aide aussi à mécaniser notre agriculture afin de renforcer la productivité. Pour englober tous les domaines agricoles, nous avons également parlé de l’industrialisation de l’agriculture à travers la transformation, des produits locaux en particulier le coton. A ce titre nous avons rencontré ici à Shanghai les responsables d’une société de textile avec qui nous allons envisager la promotion de notre coton. Les questions de la formation sont revenues au cours des échanges. Juste après la rupture des relations avec Taïpei, s’est posée la question de nos étudiants. Et nous étions tenu de transférer les étudiants burkinabè. Dès notre arrivée à Beijing, le 30 août, nous avons rencontré ces étudiants qui nous ont dit toute la satisfaction qu’ils ont eu grâce à la présence de l’Etat à leur côté pour faciliter leur inscription dans des universités en Chine populaire au-delà de cette question ponctuelle d’inscription, nous avons obtenu de la Chine populaire qui a décidé de renforcer la coopération dans ce domaine pour permettre aux Burkinabè de venir étudier dans ses universités, dans différentes filières. Nous avons également discuté des questions liées aux infrastructures, routes prioritaires, hôpitaux, nous avons évoqué la question de l’électricité d’abord des lignes de transport de l’énergie et évidemment de la question de la transformation et particulièrement de l’énergie solaire. Toutes ces questions, y compris celle sécuritaire, ont fait l’objet d’un accord de coopération que nous avons signé.

Avec la partie chinoise, nous avons décidé que la commission qui existe se réunisse rapidement. Globalement, la visite d’Etat a rempli toutes les attentes et a été une mission positive. De part et d’autre, nous avons apprécié cette reprise des relations et nous nous sommes engagé à faire en sorte que ces relations soient fondées sur l’amitié, la sincérité. Nous avons tenu à préciser au président Xi Jinping que le Burkina Faso a le sens de l’endettement. Nous avons dit que les financements que nous allons solliciter, sont des financements que nous pouvons rembourser. Notre point de vue a été apprécié par la partie chinoise qui a souhaité que nous fonctionnons dans cette démarche de sincérité, de partenariat gagnant-gagnant. Nous sommes pour notre part, engagé sur cette voie.

Il y a eu aussi la participation du Burkina Faso au troisième forum de coopération Chine-Afrique auquel vous avez participé et où vous avez eu un accueil chaleureux

Le Burkina Faso participait pour la première fois à ce forum qui existe depuis 2000. Le président Xi Jinping au cours de cette rencontre a déclaré que la Chine mettra 60 milliards de dollars pour les trois années à venir, pour soutenir l’Afrique dans plusieurs domaines tels que la production agricole, le renforcement des capacités de l’Afrique, la nécessité que l’Afrique puisse se nourrir elle-même.

Il a également évoqué la question du brassage culturel, insisté sur l’industrialisation de l’Afrique qui ne peut pas continuer à être une réserve de matières premières sans qui il devra faire en sorte que le commerce mondial puisse se développer entre l’Afrique et la Chine à travers soit les routes, les ports, les chemins de fer, ou enfin l’inter connexion sur le numérique. C’est donc un grand projet entre l’Union africaine et la Chine. Ensemble, nous verrons donc comment faire en sorte pour que le programme de l’Union africaine puisse être pris en compte dans le cadre de l’initiative de la ceinture verte. Les questions sécuritaires étaient en bonne place. Il sera illusoire de vouloir développer l’économie tant qu’il n’y pas la paix. Ainsi, l’apport de la Chine individuellement ou dans des cadres organisés comme le G5-Sahel, est attendu pour que nous puissions lutter avec efficacité contre les forces obscurantistes qui chaque jour font de nombreux morts dans nos pays. Notre participation à ce forum, précédée de la visite d’Etat, ont été  des occasions de rencontre de nombreuses structures et sociétés qui ont montré leur engagement et leur détermination à venir investir au Burkina Faso si d’aventure ces projets trouvaient des concrétisations vis -à-vis du gouvernement chinois.

A l’issue de ce forum et de la visite d’Etat que vous avez eu, peut-on quantifier ce que le Burkina pourra avoir comme contribution sous quelques formes pour la matérialisation de toutes ces intentions d’investissement

Je rappelle qu’il y a seulement trois mois que nous avons renoué avec la République populaire de Chine. En matière de dons octroyés à notre pays, le chiffre s’élève à plus de 95 milliards de francs CFA qui seront investis dans des secteurs comme la santé.

Nous avons engagé avec des sociétés chinoises des recherches de financements avec des banques chinoises. Ce sont des dossiers en cours qui feront l’objet des travaux de la commission mixte entre nos deux pays afin que nous puissions les pousser. Au nombre des dossiers qui seront étudiés, il y a l‘auto-route, les transports d’énergie avec la construction de panneaux solaires.  La question du parc industriel qui nous tient à cœur et sur lequel, nous allons travailler de manière à ajuster ces curricula au regard de notre niveau d’endettement. Le Burkina Faso a toujours fait preuve de prudence en matière d’endettement.  Nous pensons qu’il est toujours mieux, de gérer l’avenir. Aujourd’hui les pays endettés vis-à-vis de la Chine, ont vu leur endettement rééchelonné et la Chine consent à annuler purement les prêts des pays sans littoral  sur un certain nombre d’engagements. Nous sommes tenu d’avoir un endettement pour rester en conformité vis-à-vis de nos partenaires.

Au cours de votre séjour, vous avez visité de nombreuses structures spécialisées en matière de sécurité. Alors que vous êtes absent du pays, il y a eu des attaques terroristes qui ont occasionné la perte de vies humaines de nos soldats, qui font douter de la capacité de votre gouvernement à avoir la pleine mesure de la sécurité du pays. La Chine est-elle disposée à aider le Burkina dans sa lutte contre l’insécurité ?

 

Chaque fois qu’il y a une attaque contre le Burkina Faso, ou quand de façon inattendue des terroristes posent des bombes ça et là,  qui tuent des Burkinabè, cela n’est pas une attestation de l’incapacité de nos forces. Le terrorisme est un élément pernicieux. Partout où que vous soyez, quand une bombe posée par des terroristes tue des gens, cela ne traduit en rien l’incapacité des forces de défense et de sécurité, c’est le caractère indicible de ces actes terroristes qui posent problèmes. Ce qui est important contre le terrorisme, il faut que nous renforcions la collecte des informations en demandant aux Burkinabè de contribuer à ce que le pays soit plus efficace à cette lutte contre le terrorisme. Sur l’action de la Chine pendant longtemps ce pays avait décidé de contribuer au G5-Sahel, mais ne nous mettait pas dans la liste puisque nous n’avions aucune relation diplomatique. Au cours de notre séjour nous avons discuté de la question avec le gouvernement chinois mais aussi avec les sociétés d’armement en Chine qui peuvent produire des armes adaptées au combat contre le terrorisme dans notre pays. Le président Xi Jinping a demandé que nous puissions faire venir une mission militaire ici pour discuter de ces questions avec le ministre de la défense de la République populaire de Chine de manière à ce que le matériel que nous voulons puisse être adapté au combat que nous voulons mener.

Après cette première participation du Burkina au forum Chine-Afrique, selon vous quelles leçons l’Afrique peut-elle tirer de l’expérience chinoise après avoir vu ses infrastructures architecturales, ses méga-structures hors-normes et son modèle économique dans lequel l’Etat est omniprésent ?

Il y a quelques années, la Chine vivait une pauvreté endémique. La Chine, c’est d’abord l’engagement des hommes, leur courage, la discipline et le sens de l’intérêt national, l’engagement national. C’est autant de choses qui nous manquent en Afrique. Prenez l’exemple de la Grande maison du peuple à Pékin où toutes les grandes rencontres se tiennent. Elle a été construite sous Mao Zedong en dix mois avec trente-deux mille employés. La Muraille de Chine construite par des hommes pour résister à l’attaque extérieure, est un autre exemple qui montre le fruit de l’abnégation et du courage, l’engagement pour le pays et la discipline.

Tant que ces facteurs n’existeront pas l’Etat a beau vouloir diriger, ce sera difficile. Grâce à ce dynamisme, aujourd’hui il y a trois cent millions de chinois qui constituent la couche moyenne et  qui sont des consommateurs potentiels. La lutte contre la pauvreté a en même temps eu ses résultats par l’industrialisation, la consommation, la transformation, l’agriculture. Selon le président Xi Jinping aujourd’hui, il reste trente millions de chinois qui vivent sous le seuil de la pauvreté et il se donne trois ans pourque chaque année, il y ait dix millions de chinois qui quittent ce cercle. Sortir de la pauvreté est une chose possible, pour nos Etats à condition que nous puissions mettre l’intérêt supérieur de nos pays au-dessus de nos intérêts égoïstes.

Propos recueillis à Shanghai par Zowenmanogo

ZOUNGRANA

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