Signature de l’accord politique au Soudan : En attendant le verdict du terrain

Signature de l’accord politique au Soudan : En attendant le verdict du terrain

Enfin ! De tractations en étirements, les filles et fils du Soudan ont fini par trouver un terrain d’entente. Une déclaration politique a été signée par l’armée et les civils. Elle met au monde une transition d’une durée qui ne court pas les rues : trois ans et trois mois.

L’attelage n’est cependant pas inédit. Les civils et les militaires seront paritairement harnachés (cinq par partie) avec un «arbitre» civil qui sera à la fois adoubé par l’ensemble des deux camps. Enfin, une commission d’enquête indépendante va se mettre sur pied pour élucider les morts qui ont eu lieu depuis la chute de Mohamed El Béchir.

Mais pour que le moteur de la transition puisse démarrer, il faut un décret constitutionnel qui fera office de clé de contact. Et pour que cette clé elle-même démarre, des négociations vont commencer ce vendredi. D’autres tractations sont donc encore en vue et l’un des points d’achoppement est déjà clair : l’amnistie à accorder aux putschistes.

L’accord est donc signé. Bravo ! Il reste maintenant le plus difficile. L’appliquer. Et là-dessus, la greffe armée-civils risque de traverser quelques zones de turbulence.

D’abord, la durée. Trois ans, ce n’est pas trois jours. La cohabitation risque d’être des plus tendues. Il faudra concilier les points de vue, les points d’intérêt, notamment entre les civils qui veulent rompre définitivement avec le régime militaire pour instaurer un «diktat» des civils à travers des réformes profondes.  La tentation d’une société républicaine, où l’armée est au service d’une classe politique dirigeante sans velléité d’ingérence dans les affaires politiques est forte. Et de l’autre côté, des militaires qui ne voudront pas certainement renoncer à certaines habitudes empilées depuis plusieurs années et à des prébendes qui leur seront certainement coupées avec un changement radical. Ces trois fois douze prochains mois promettent donc d’être un vol tumultueux.

Ensuite, il y a cette commission indépendante qui est promise dans la déclaration politique. Ironie du sort, ladite déclaration a été signée par un certain Mohamed Hamdan Dogolo alias Hemidti. Ce dernier est le commandant de la Force de soutien rapide (FSR). C’est cette milice, réputée être l’une des plus puissantes du monde arabe, qui est accusée d’avoir commis les récents massacres au Soudan.

Que se passera-t-il si la commission d’enquête indépendante nationale venait à boucler son investigation et à indexer la FSR comme auteur principal de ces crimes ? Ou Hemidti compte-t-il sur l’amnistie consignée dans le projet de décret constitutionnel pour assurer sa sérénité ? Et que se passera-t-il si le décret n’a pas été adopté dans sa mouture espérée ?

L’accord a été signé donc au Soudan. Il faut applaudir. Il reste à croiser les doigts pour qu’il puisse survivre pendant les trois prochaines années de son espérance de vie.

Ahmed BAMBARA

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