La CEDEAO a enfin donné de la voix, une voix discordante évidemment relativement à l’interruption du pouvoir issu du suffrage universel en Guinée. 10 chefs d’Etat en visioconférence sur les 15 ont taclé hier 8 septembre ce coup d’Etat qui jure d’avec la Charte de bonne gouvernance de l’organisation sous régionale. Dans la foulée :
– Suspension de la Guinée de toutes les instances de la CEDEAO ;
– Exigence de la libération du président déchu Alpha Condé ;
– Sanctions non encore spécifiées contre la Guinée.
La CEDEAO applique exactement son protocole en cas de coup d’Etat et à y regarder de près, ce sont les mêmes rodomontades adressées à Assimi Goïta au Mali, qui ont été transmises à Mamady Doumbouya. Et pour couronner le tout, ledit protocole serait incomplet, sans le débarquement de missi dominici attitrés au nombre desquels la ministre ghanéenne des Affaires étrangères, Shirley Ayorkor Botchway, qui commence à devenir une spécialiste de gestion d’après-coup d’Etat ou en tout cas de crises politiques. On l’a vue en Côte d’Ivoire lors de la sanguinolente présidentielle et au Mali. Et évidemment, le visage de cette CEDEAO Jean-Claude Kassi Brou est aussi de cette mission de bonne conscience.
La CEDEAO est bien dans son rôle en Guinée et ces derniers temps d’ailleurs, en lieu et place d’une inertie, ou d’un atermoiement qui frisent l’incompétence, la CEDEAO est à la bourre. Sauf que pour le cas d’espèce des coups d’Etat, sa potion qu’elle fait mine d’administrer est au mieux un placebo au pire un pensum, c’est-à-dire un travail inutile et ingrat. Si au Mali, on l’a senti tenter de contenir l’arrivée des militaires qu’on sentait venir, en Guinée et en Côte d’Ivoire, elle aurait dû opposer une fin de non-recevoir aux 3e levées de Condé et Ouattara. Les laisser faire et tenter d’en gérer les éventuelles conséquences est …. inconséquent. Ces deux présidents qui contre vents et marrées ont tordu le cou à leurs différentes Constitutions pour s’accorder un troisième bail au prix de nombreux morts, blessés et de prisonniers politiques.
En Guinée, la CEDEAO a suivi la dernière présidentielle, tachetée de fraudes, de sang et de cadavres. Impuissante, elle a assisté impassible, (que pouvait-elle du reste faire ?), à l’embastillement de centaines de personnes qui avaient voulu faire respecter la loi fondamentale dans ces pays. Si elle n’a pas pu faire entendre raison à Alpha Condé qui briguait le mandat de tous les dangers, alors, le coup d’Etat du 5 septembre dernier qu’elle condamne pour la forme, est une des suites logiques à la forfaiture de Condé.
Que pourront les envoyés spéciaux de la CEDEAO qui atterrissent aujourd’hui à Conakry ?
Ont-ils dans leur attaché-case une mouture de transition à proposer au CNRD ? Si oui, est-elle la même que celle qui est dans la tête du colonel Doumbouya ?
La CEDEAO ne doit-elle pas revoir sa Charte de bonne gouvernance pour intégrer un article ou un alinéa concernant les coups d’Etat, qui sont manifestement de retour ?
Davy Richard SEKONE
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