Dimanche 15 décembre, Niamey, alors que l’harmattan charrie son cortège de poussière et de petits bobos pathologiques, lequel dimanche marquait la fin du deuil de 3 jours décrété par le président Issoufou, consécutif à la ‘’boucherie’’ d’Inates, les 4 homologues du n°1 nigérien du G5-Sahel, se sont retrouvés à ses côtés.
Cap d’abord sur le carré des Martyrs pour s’incliner devant les sépultures des 71 soldats, puis ensuite, cénacle entre eux pour parler de ce qui les empêche de dormir à l’heure actuelle : les itératives attaques terroristes, et mieux se pourvoir pour la rencontre de Pau en janvier 2020 avec Emmanuel Macron.
Ce sommet extraordinaire du G5-Sahel de Niamey initialement prévue à Ouaga et dont la tenue a été défloré, il y a 72 jours heures par IBK lors du lancement du dialogue national inclusif de Bamako, se veut d’abord être un conseil de guerre face à la recrudescence des équipées terroristes et au nombre de victimes grandissantes, mais également un brainstorming avant Pau.
En effet primo, rien qu’en prenant le cas des casernements militaires attaqués, abstractions faites des tueries isolées, il y a de quoi s’inquiéter : Boulkessi au Mali attaqué dans la nuit du 29 au 30 septembre 2019 avec 38 tués, 33 soldats portés disparus et 16 blessés, celui de Koutougou au Burkina Faso, faisant 24 victimes et Inates avec ses 72 militaires tués, ça fait beaucoup, et il est impérieux pour ces 5 chefs d’Etat, devenus chefs de guerre, de revoir de fond en comble la stratégie de riposte.
Secondo, si le président malien, au lendemain de la mort des 13 soldats de Barkhane dans le crash d’hélicoptères dans le Liptako-Gourma, et suite au reflux anti-politique française, si IBK déclarait «qu’il ne faut pas mordre la main tendue de la France, … qu’il faut dépasser le complexe colonial vis-à-vis de cette France» et son homologue burkinabè et président en exercice du G5-Sahel Roch Kaboré ajoutait «que le ton et les termes de Macron posent problème et qu’il faudra que Pau permette de clarifier la coopération avec Barkhane… et que les pays du Sahel ont besoin d’alliés en toute responsabilité et dans le respect», s’il y a eu ces sorties de ces 2 premiers responsables, c’est que l’atmosphère France-Sahel était devenue passablement suffocante. Même si l’envoi de Christophe Bigot, l’émissaire macroniste dans 3 capitales du Sahel a tenté de dérider la situation.
La tragédie d’Inates et le report du rendez-vous de Pau auront été une aubaine pour ces chefs d’Etat, de faire front commun dans la capitale du Niger.
Niamey, et les quelques bribes du huis-clos le laissent percevoir, c’est le lieu de préparation du mémoire en défense des populations sahéliennes, par leurs présidents lesquelles populations sont de plus en plus rétives à la présence de soldats étrangers, et plus particulièrement français sur leur sol. Comment expliquer que la France hyper puissance militaire, avec ses 4 500 hommes, ses avions de guerre, ses drones, et sa technologie semble impuissante face aux terroristes ? Une interrogation d’ailleurs dont s’est fait l’échos, (lors du sommet sur la paix et la sécurité à Dakar) le président sénégalais Macky Sall, «comment une poignée de terroristes parvient à résister à toute cette puissance militaire ?».
Comment expliquer que les 500 assaillants qui ont fondu sur la caserne militaire d’Inates, avec le vrombissement des motos, et des pick-up, n’aient pas été repérés par les «yeux et les oreilles» de la technologie de Barkhane ?
Quand on a vu les images de Boulkessi, de Koutougou, et d’Inates, on peut comprendre la colère des Sahéliens, même si dans cette bande sahélo-saharienne, la mort reste la mort pour tous, et les 13 cercueils de soldats français rapatriés du Liptako-Gourma, rendent une opinion française hébétée, nerveuse, et interrogative, sur la présence de la France dans cette ‘’OPEX’’ africaine. Voilà autant d’arguments qui pourraient sortir de Niamey pour Pau. Ensuite il faudra que le G5 soit chapeauté par le chapitre 7 onusiens.
Et si on s’appesanti sur le vocable «clarification», les 5 chefs d’Etat devront aussi avoir sous le bras en allant dans le Sud-Ouest de la France en janvier 2020, la doctrine militaire, le modèle, la stratégie de lutte contre le GSIM, EIGS, et autre FLM sans la France, celle-ci venant en appoint. Par exemple, le changement de tactique de lutte à la gorge des 3 frontières (Burkina-Mali-Niger) reste un début de solution, initié par le Mali.
«Aidez-nous, mais voilà ce dont nous avons besoin que vous fassiez», c’est la substance du message que devrait véhiculer le G5-Sahel à Pau.
La France, au-delà des menaces de se retirer du Sahel, devra également dire clairement, ce qu’elle fait et surtout ce qu’elle ne fait pas et ne peut pas faire au Sahel. Sans inverser la charge de la preuve, la France devra lever certains préjugés tenaces tels :
-Quid des métaux précieux, et des richesses sahéliennes qu’elle lorgne ? Ils sont où le pétrole et les terres rares qu’elle convoite ? Niamey avant Pau, doit, sinon ce serait encore une réunion de plus, et ce au-delà des cris d’orfraie légitimes des populations, Niamey devra arrêter le modèle sécuritaire du Sahel face à cette guerre «molle», lequel document commun devra être présenté à cette puissance tutélaire, dont l’aide et la politique paraissent de plus en plus ombrageuse pour certains. Tout cela nécessite une dose de courage et de la sincérité de part et d’autre dans la lutter contre ces croquants sanguinaires du Sahel.
Zowenmanogo ZOUNGRANA
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