Tensions au CSM : Le REN-LAC appelle à  l’assainissement du milieu

Tensions au CSM : Le REN-LAC appelle à  l’assainissement du milieu

Le secrétariat exécutif du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC), a animé un point de presse le mardi 26 juin 2018 à son siège, pour donner sa lecture et sa position sur la situation qui prévaut au Conseil supérieur de la magistrature. Tout en saluant cette initiative qui a permis de sanctionner des magistrats, il invite le Président du Faso, à écouter les acteurs et à s’engager dans l’assainissement de l’institution.

Le 9 juin 2018, par un communiqué, le Président du Conseil de discipline du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) portait à la connaissance de l’opinion publique, les conclusions auxquelles ledit Conseil est parvenu. De ce communiqué il ressort que Dix-huit (18) magistrats ont écopé de sanctions disciplinaires, allant du blâme à la révocation en passant par des abaissements d’échelons, des rétrogradations et une mise à la retraite d’office de deux hauts magistrats dont le Procureur général près la Cour de cassation et la présidente de ladite cour, par ailleurs présidente du CSM. A travers une conférence de presse, le Secrétariat exécutif du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) a donné sa lecture et sa position sur la situation qui prévaut au Conseil supérieur de la magistrature. Mais avant le secrétaire exécutif du REN-LAC, Claude Wetta, a expliqué les raisons qui ont conduit à ces sanctions. Il soutient que c’est suite à de multiples soupçons de corruption et de manquements à la déontologie impliquant des magistrats que le CSM a décidé à sa session du 28 juillet 2016, de mettre en place une commission d’enquête. En plus de soutenir la commission d’enquête dans ses travaux, le Réseau a salué une initiative qui devrait aider à assainir le milieu judiciaire. A l’issue des investigations, la commission procédait à la remise de son rapport le 6 juillet 2017, à la présidente du CSM. «Sur cinquante-et-un (51) dossiers, la commission a conclu à l’existence de manquements à l’éthique et à la déontologie dans vingt-neuf (29) dossiers impliquant principalement trente-sept (37) magistrats, trois (3) avocats, cinq (5) greffiers, quatre (4) officiers et agents de polices judiciaires (OPJ/APJ) de la gendarmerie nationale», informe Claude Wetta. Sur la base donc de ces résultats, il précise que la commission a recommandé entre autres, la mise en branle de la procédure disciplinaire pour manquements constatés et l’ouverture d’enquêtes sur des dénonciations qu’elle n’a pas pu examiner. Par la suite, le ministre de la justice saisira officiellement le CSM en vue du déclenchement de la procédure disciplinaire. Ce qui fut fait et le résultat on le connaît. La commission d’enquête remise en cause par des acteurs. Cependant, le secrétaire exécutif du REN-LAC signale que ce processus ne s’est pas déroulé sans incidents. En effet, il explique que certains acteurs épinglés dénonçant des règlements de comptes syndicaux, ont remis en cause la régularité de la mise en place de la commission d’enquête, les conclusions de ces travaux. Suite à cette guéguerre, le Président du Faso, adressera une lettre à la Présidente du CSM pour s’inquiéter de la situation qui prévaut. Face à ces incidents, le REN-LAC dit avoir pris l’initiative de rencontrer les trois syndicats de magistrats (SAMAB, SBM, SMB), tous membres du réseau afin de mieux cerner la situation au sein de l’institution judiciaire. «Les éléments d’informations obtenues par le REN-LAC dans le cadre de ces rencontres et celles exposées dans la presse par certains acteurs laissent apparaître clairement une divergence au sein de la magistrature quant aux travaux de la commission et au déroulement de la procédure disciplinaire ayant abouti à des sanctions», a déclaré Claude Wetta. De ses dires on retient que des acteurs pensent que la mise en place de la commission d’enquête a créé un environnement favorable pour des règlements de comptes internes, de nature à engendrer une fissure sans précédent au sein de la magistrature et partant de la discréditer davantage. Pour d’autres, les griefs ci-dessus énumérés relèvent de stratégies de blocage pour garantir l’impunité aux acteurs judiciaires quand bien même les fautes commises sont gravissimes et discréditent le troisième pouvoir. En sus, la lettre du chef de l’Etat adressée à la présidente du CSM sans avoir entendu le CSM, apparaît aussi comme un retour de l’ascenseur à la présidente pour le rôle trouble que celle-ci aurait joué dans l’affaire dite des mandats d’arrêt contre Guillaume Soro et autres. Ces derniers estiment aussi que la décision du conseil d’Etat ne peut produire d’effet escompté car s’attaquant à une décision qui a fini de produire ses effets. «Ces cas de soupçon de corruption et de manquement à la déontologie au sein de la magistrature, ne semblent pas faire l’unanimité au sein des principaux concernés», a dit Claude Wetta. Le REN-LAC tient cependant à rappeler qu’au regard de l’évolution de la situation, le Comité de l’intersyndical des magistrats a produit un communiqué en date du 12 novembre 2017 pour rassurer les magistrats. Le Réseau note que malgré la démarche inclusive et cette interpellation de l’intersyndicale, les acteurs judiciaires restent divisés sur la conduite des investigations et de procédure disciplinaire. La justice impuissante face aux puissants. Après avoir suivi le déroulement de cette affaire, le REN-LAC note que lorsqu’elle est à l’épreuve de dossiers impliquant des puissants (hommes politiques, économiques, hauts gradés de l’armée et des magistrats), la justice devient subtilement impuissante tant les obstacles procéduraux sont insurmontables. Ce qui tend à garantir ainsi une immunité d’office voire une impunité absolue à ces acteurs. Pour le REN-LAC, il importe donc d’examiner rigoureusement tous les dossiers au fond pour ne pas garantir l’impunité à des citoyens qui se sont compromis en pratiquant des actes de corruption et/ou se sont adonnés à des manquements à l’éthique et à la déontologie de leurs professions. En tout état de cause, le réseau félicite l’ensemble des acteurs pour la mission assumée avec courage et détermination. Il interpelle le Conseil supérieur la magistrature à prendre toutes les dispositions nécessaires pour d’une part, élucider tous les autres cas portés à la connaissance de la commission et d’autre part, élargir son spectre d’action pour prendre en compte la période d’avant 2010. De même, le Réseau invite le chef de l’Etat, en sa qualité de garant de l’indépendance de la magistrature, à écouter les acteurs judiciaires et à les engager dans l’assainissement de l’institution judiciaire, pilier de l’Etat de droit. En sus, il interpelle les acteurs (avocats, GSP, greffiers, gendarmerie nationale) à engager des procédures disciplinaires et pénales à l’encontre des membres de leur corporation respective épinglés. Par ailleurs, à l’ensemble des acteurs, soucieux d’une justice saine et au service du peuple, le REN-LAC lance un appel à la vigilance face à la situation qui prévaut au sein de la justice.

Pélagie OUEDRAOGO

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