Transition au Mali : Goïta «Songo fla» impose  son agenda à la CEDEAO

Transition au Mali : Goïta «Songo fla» impose  son agenda à la CEDEAO

En 48 heures et à 38 ans, dont plusieurs passées à la tête de l’Unité spéciale de Kati, le colonel Goïta a ramené le Mali 9 mois en arrière avec son deuxième putsch. Voix hésitante, quoique tonante, barbe de broussaille bien taillée, éternelle tenue kaki, l’actuel homme fort du Mali a froissé et jeté la Charte de la Transition, mis entre parenthèse le peuple et la Communauté internationale dont il se soucie comme de ses premiers pataugas !

Les émissaires de haut vol de la CEDEAO conduits par l’homme à l’éternel stetson vicé sur la tête Goodluck Jonathan, savaient la mission malienne périlleuse, en tout cas plus risquée qu’au lendemain du putsch du 18 août 2020. Et si certains envoyés ont quitté fissa Bamako après la rencontre-échec de Kati c’est que la CEDEAO est au milieu d’un guet fangeux. C’est qu’au contraire du 1er pronunciamiento de Goïta qui bénéficiait de préjugés favorables chariés par le puissant blikrietz du M5-RFP et de l’affaiblissement du pouvoir d’IBK plombé par les affres du terrorisme et les affaires de corruption, à l’opposé de ce coup d’Etat d’août, celui perpétré ce lundi 24 mai à Bamako, s’est déroulé dans un contexte où les Maliens et la Communauté internationale avaient les yeux rivés sur le déroulement de la transition et surtout la préparation des élections.

Le colonel Assimi Goïta en a décidé autrement. Que ce soit l’éviction des colonels Modibo Koné de la défense et Sadio Camara de la sécurité du gouvernement, ou cette histoire ténébreuse réelle ou fantasmée de commande d’armes à la Russie, dont le président Bah N’Daw aurait vendu la mèche à Emmanuel Macron, ce Goïta «songo fla» (2e fois de Goïta) expression en Bamana qu’on entend dans les rues de Bamako, ce second coup d’Etat de Goïta complique la tâche de la CEDEAO. Surtout que comme IBK il y a 9 mois, Bah N’Daw a rendu le tablier de force. A-t-il tenu à garder son premier ministre, Moctar Ouane exécré par les colonels putschistes, tout comme IBK a tenu à garder le sien Boubou Cissé jusqu’à la fin ?

Voilà la CEDEAO avec une transition qui n’en est plus une vidée de sa substantifique moelle, puisque la vitrine présentable et exigible dans la charte est désormais craquelée. Le Mali est maintenant dirigé par la junte. Après le CNSP I, voici venus les jours du CNSP II avec Goïta qui après la défenestration politique depuis Kati des 2 têtes de l’Exécutif civil a pris tout le pouvoir. A l’évidence, Goïta a décidé de finir proprement le travail qu’il a débuté avec ses compagnons d’armes putschistes en août 2020, c’est-à-dire diriger et la transition et probablement faire tomber la tenue de camouflage à l’orée des élections pour se présenter à la présidentielle, ou à défaut mettre un homme-lige.

Et au vu de cette seconde forfaiture et la division au sein de la société malienne, il est fort probable que Goîta ait de nombreux alliés au sein des partis politiques. Un coup d’Etat militaire ne se fait jamais sans la complicité de civils. On parle même d’un rapprochement Goïta-M5-RFP. C’est clair également que Goïta ne tient pas la CEDEAO en haute estime, même s’il craint les effets des sanctions qu’elle viendrait à lui infliger.

La foudre du côté de la Maison en verre de New-York avec la réunion du Conseil de la sécurité, n’est pas sûre de tomber puisqu’on parle d’un éventuel blocage de la Russie ! Restent les mesures coercitives déjà en téléchargement aux USA, dans l’UE et sûrement, celles de la CEDEAO, à l’issue de la réunion des chefs d’Etat qui serait imminente.

Raisonnons un peu : qu’il s’agisse des 2 portefeuilles ministériels lestés évidemment de tous les privilèges, ou de supposées grosses commandes de matériels militaires d’où pourraient émarger des rétrocommissions, on devine que ce sont in fine, des intérêts bassement matériels et personnels qui ont prévalu à ce retour du Mali, 9 mois en arrière.

Jamais depuis 1991, lors de la Révolution, le Mali n’a autant touché le fond. Car une chose est de faire un coup d’Etat, en brandissant des raisons et motifs qui tiennent plus ou moins débout, une autre est la gestion du pays, à fortiori un Mali «terrorisé» et tétanisé en proie à une fronde sociale endémique.

En août 2020, lors du 1er putsch, on avait dit de ce quarteron de colonels, qu’ils étaient futés, bien formés et savaient ce qu’ils voulaient. Mais savent-ils ce que les Maliens veulent vraiment ? Pourront-ils être à la hauteur de leur forfaiture ? Les Maliens fatigués sont partagés entre colère, désillusion, et (faux) espoir. Et le colonel Goïta lui semble vouloir forger son destin national envers et contre tout. Jusqu’à quand ?

La REDACTION

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