Tshisekedi investi président en RDC : Il faut maintenant convaincre

Tshisekedi investi président en RDC : Il faut maintenant convaincre

C’est historique. Félix Tshisekedi a pris officiellement les rennes de la République démocratique du Congo (RDC). Paisiblement. Sans effusion de sang. Sans coup de feu. Des mains d’un président sortant, qui lui a porté l’accolade, tout sourire dehors. Sa barbe, qu’il portait depuis plusieurs mois et qu’il a rasée pour la circonstance, montre que Joseph Kabila a accordé une importance particulière à cette cérémonie du 24 janvier 2019, où il perd, du moins pour les yeux des mortels, le pouvoir.

La RDC vient de tourner la page et d’entrer dans l’ère démocratique. Un président a été élu par les urnes. Et il s’installe dans le fauteuil présidentiel, sous la bénédiction des gardiens de la Constitution.

Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Derrière cette investiture, se cachent des non-dits, des tensions, des courroux, des grognements et des murmures d’insatisfaction. Jusqu’à la fin de ce mandat qui commence, Tshisekedi ne pourra pas effacer la tache indélébile aux allures de péché originel qui s’y est accrochée depuis la proclamation de sa victoire par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), vite remise en cause par l’Eglise catholique, ainsi que par les organisations régionales et africaines ainsi que l’Union européenne.

Ces dernières pourront être tancées de vouloir défendre leurs intérêts mercantilistes, géopolitiques ou stratégiques, mais le sermon et le doigt levé des prêtres troublent tout de même le sommeil.

Félix Tshisekedi a donc un double combat à mener. D’abord, externe. La rebuffade essuyée par les dirigeants de l’Union africaine, le Rwandais Paul Kagamé en tête, risque de ne pas passer aussi facilement et complique déjà la tâche du nouveau Chef d’Etat sur le plan international. Joseph Kabila a su tenir tête et a réussi à «vivre» presque en marge de l’Afrique et du monde. Pour un Chef d’Etat qui prône la rupture avec le passé et l’établissement de nouvelles bases pour le développement de la RDC, une défiance, voire une méfiance au plan africain et international, n’est pas un bon ingrédient de départ.

Du reste, la représentation diplomatique à son investiture, marquée par la présence d’un seul Chef d’Etat, notamment africain, comme en 2011 à «l’intronisation» de Joseph Kabila, est une preuve, s’il en avait encore besoin, qu’un nœud gordien attend qu’il le dénoue sur le plan international.

Au plan interne, ses travaux d’Hercule n’en seront pas moins rudes. D’abord, il lui faudra lutter pour se défaire de la tutelle, ou du moins, de la pression de son nouveau et brusque «partenaire politique», en l’occurrence, le président sortant Joseph Kabila. Ce dernier, à l’évidence, ne se tiendra pas loin du palais présidentiel et tiendra à ce que ses intérêts ne soient pas bafoués. Il s’échinera sans doute, à investir tous les compartiments de la gestion de Tshisekedi et il lui faudra allier à la fois, poigne et virtuosité pour retirer sa main enfoncée jusqu’à l’épaule dans la gueule menaçante du crocodile.

Ensuite, Martin Fayulu est aux aguets et fera tout pour faire rendre gorge à ceux qu’il considère comme des «brigands électoraux». Chaque acte, chaque action, chaque décision, chaque propos sera criblé certainement de critiques et le mandat du nouveau président n’en sera que plus ardu. Si tant est que la contestation se cantonne aux frontières des joutes verbales et des critiques sont suivies d’expression physique.

Enfin, l’Eglise catholique sera la mauvaise conscience de Félix Tshisekedi jusqu’à la fin de son mandat. Comment, en effet, désormais aller à confesse ou à la messe sans craindre de tomber sur le regard accusateur d’un prêtre ? Ce sera sans doute le joug le plus difficile à porter par le Président de la République démocratique du Congo. Si tant est que sa foi politique n’a pas occis depuis longtemps sa foi de croyant… 

Ahmed BAMBARA

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