VGE et l’Afrique : Le président-génie et les diamants «maudits» de l’Oubangui

VGE et l’Afrique : Le président-génie et les diamants «maudits» de l’Oubangui

Lorsqu’il est élu en 1974, c’était tout feu, tout flamme. Son arrivée à l’Elysée avait suscité l’espoir dans le giron africain. Il a promis la rupture. Le changement. La remise de l’Afrique aux Africains. La «vraie» indépendance. Dans ses mains, des ciseaux pour rompre ce fameux cordon ombilical qui garde liée la France à ses anciennes colonies. Le président «post-colonialiste» était donc né. Bac à 15 ans, Enarque, X, président à 48 ans le plus jeune de la Ve République, VGE était assurément un président-génie. Et il l’a prouvé par des réformes hardies et européen jusqu’à la moelle, il l’a été. L’IVG, la majorité à 18 ans, l’arrimage du couple franco-allemand avec le chancelier Shmith, c’est encore lui !

La suppression au chalumeau du Secrétariat général des affaires africaines de Jacques Foccart dès sa prise de fonction renforçait le sentiment que les choses allaient vraiment changer. Son incursion osée et acceptée dans l’hostile Algérie, le rétablissement du «courant» entre de nombreux chefs d’Etat africains ont fini par faire croire que les choses allaient désormais prendre un chemin autre que le trajet gaulliste à la sauce foccartienne.

De ce fait, il ressemble pratiquement à tous les chefs d’Etat français qui allaient lui succéder. Chacun, presque, a la même trompette à la bouche dès les premiers vagissements de leur mandat. Rupture, rupture, rupture et rupture. Ces sirènes sont accueillies quasiment avec la même ferveur. Mais la suite de la symphonie se passe généralement dans les dédales de la dysharmonie et du mauvais accord entre le texte politique et la mélodie du terrain.

C’est ce qui est arrivé à Valéry Giscard d’Estaing, emporté par le coronavirus alors qu’il voguait au-dessus de ses 95 ans. Qui fut VGE pour le continent ? La réalité du terrain africain, ses codes, ces «irréductibles lignes directrices de la matrice française», ont fait que le 3e mandat de la Ve République eut un destin singulier avec l’Afrique. Le saut des para-colos sur Kolwezi c’est encore lui. L’image du chasseur blanc, voguant sur l’Oubangui, où dînant au palais de la Renaissance, avec l’empereur Bokassa, c’est toujours Giscard.

Dans cette RCA, qui était encore à peine sortie des nimbes du colonalisme, VGE sera rattrapé en France en septembre 1979, par des pierres précieuses, offertes à lui par l’enfant de Berengo, en 1973, alors qu’il n’était que ministre des finances De Gaulle. Une erreur, une faute politique qu’il paya cash.

Pan sur le bec ! Le canard enchaîné qui a levé ce lièvre qu’on croyait endormi, fit chuter VGE dans les urnes, et qui se contentera d’un Au revoir télévisé, au son de la Marseillaise !

C’est le pied de nez le plus tonitruant qui lui a coûté sa réélection lequel a brillé par l’éclat des diamants de Jean Bedel Bokassa. Ces joyaux du président centrafricain, que d’Estaing a pourtant contribué à asseoir l’apogée, puis le déclin, ont coûté sa réélection au Français «Africain».

Comment s’est-il laissé entraîner dans ce travers contraire à ses déclarations ? A-t-il été piégé par une sorte d’entreprise de revanche de la politique foccartienne ? Ou la France n’est qu’une continuité, en ce qui concerne ses relations avec l’Afrique, avec laquelle tous ses dirigeants doivent composer, sans avoir une marge de manœuvre conséquente pour modifier trajectoire, paradigmes et orientations ? Rien n’est exclu.

Quoi qu’il soit, Valéry Giscard d’Estaing avait de beaux desseins. Mais la politique n’a pas que des traits plaisants. Tout comme les relations entre les pays. Lorsque les intérêts de la nation sont en jeu, que ces intérêts «suprêmes» se mélangent à ceux bas et de bas instincts individuels et mercantilistes, les épopées lyriques aux ambitions généreuses se noient dans une chute dans la noire mer des particularismes communs de l’Histoire. Néanmoins, Valéry Giscard d’Estaing aura essayé. Il restera dans l’esprit des concitoyens comme un président réformateur «la France comme passion et l’Europe comme horizon» selon le mot du premier ministre, Jean Castex. Quant à l’Afrique tout se ramène hélas à ces fameux «maudits» diamants et ses relations avec Bokassa. L’Histoire retiendra, que cet homme cultivé, ce «génie», qui passait des citations de Thycididde à Sophocle, et qui est devenu un Immortel fut incompris et victime de la Francafrique (déjà !) 

Ahmed BAMBARA

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